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CHRONIQUE

Le grand ballon captif à vapeur. — L’aérostat de M. Henry Giffard a été ouvert au public le dimanche 28 juillet.

À 1 heure de l’après-midi, la foule s’est précipitée dans l’enceinte et le ballon a exécuté des ascensions de 500 à 600 mètres d’altitude. Le nombre des passagers est si considérable qu’il faut leur donner des numéros de correspondance, comme à de simples voyageurs d’omnibus. Le lendemain lundi plus de 400 personnes ont monté dans la nacelle. Parmi les voyageurs nous citerons les ambassadeurs chinois, et un grand personnage anamite. La splendeur du panorama de Paris excite une admiration générale. Des observations météorologiques sont organisées dans la nacelle.

L’orage du 22 juillet en Alsace. — Voici quelques détails sur notre orage du 22 juillet dernier. Depuis bien longtemps le fluide électrique ne s’est point manifesté ici d’une façon aussi terrible que ce soir-là. Il était six heures, lorsque les premiers grondements du tonnerre ont été entendus du côté du sud-ouest. La journée avait été fort belle ; le baromètre avait peu fléchi : seule la chaleur avait été accablante. Mon thermomètre marquait 32 degrés à l’ombre, peu avant l’orage. Presque point de vent dans l’air ; les nuages marchaient lentement du S. O. vers N. E. C’est par la trouée de Belfort que l’orage est venu s’abattre sur l’Alsace. À six heures et demie il éclatait sur Lachapelle. Pendant une heure et demie le tonnerre n’a cessé de gronder avec furie ; le ciel était en feu ; les éclairs étaient splendides d’éclat et de formes. Toutes les deux, trois minutes, la foudre se déchargeait sur Le sol. Le ciel jaune-sombre, l’obscurité très-grande : il a fallu allumer les lampes dans les appartements. Vers 7 heures la pluie est tombée averse : l’udomètre a marqué 14 millimètres pour un quart d’heure de pluie. Les dégâts occasionnés par la foudre ont été ici, à Lachapelle, assez peu sérieux : tout s’est borné à un paratonnerre foudroyé, à deux gros aunes frappés simultanément à 2 mètres de distance, à quelques peupliers écorchés le long de la route.

Ailleurs les accidents ont été plus graves. L’orage a passé sur toute l’Alsace de haut en bas. Il s’est montré à 6 heures à Belfort ; trois heures après il avait atteint Strasbourg. À Belfort, deux bâtiments ont été foudroyés ; les dégâts sont insignifiants. Aux Errnes, la foudre est tombée sur l’auberge Henckel : l’enseigne a été mise en pièces et un ouvrier accoudé tout près à la fenêtre a eu le bras droit paralysé. L’église de la Rivière a été frappée deux fois : une large fissure se remarque sur le pignon. À Rongemont, le feu du ciel est descendu sur une cheminée, qu’il a démolie. Une ferme sur la montagne a été incendiée. Près de Massevaux, à Huppachs, une grange a été brûlée. À Aspach et à Vieux-Thann, trois maisons d’habitation ont été réduites en cendres. À Viller, dans la vallée de Wesserleng, la foudre est tombée sur un tissage et a brisé un des métiers. À Soultz, près de Guebviller, le fils du garde-forestier a été tué sur le coup à vingt pas de la maison. Des incendies ont été allumés par le fluide électrique à Ribeauville, à Erstein, à Geispolsheim dans le Bas-Rhin. L’ancienne colonie pénitentiaire d’Oswold, à une lieue de Strasbourg, n’existe plus : les granges et une bonne partie des récoltes ont été brûlées par la foudre ; on pu sauver le bétail. Les dégâts occasionnés à Oswald par l’incendie sont estimés à 90 000 francs. Quelle soirée désastreuse pour l’Alsace ! Rien n’a manqué au budget traditionnel de la foudre. L’abbé J. Wagner

Un puits funéraire près d’Agen (Lot-et-Garonne). — On a découvert au lieu dit Couêche, sur le plateau de l’Ermitage, près Agen, un puits funéraire qui a été fouillé par le propriétaire du champ, Pierre Donnadieu. Ce puits dont la largeur est de 1 mètre et la profondeur de 11, est circulaire et le fonds se termine en pointe. Il est parementé en pierres brutes de moyenne grosseur, superposées et juxtaposées sans mortier, le tout formant un mur de 0m,90 d’épaisseur.

Les couches supérieures étaient composées de terre végétale et de débris insignifiants formant un simple remplissage. À partir de 6 à 7 mètres, des infiltrations d’eau avaient pénétré les couches superposées qui renfermaient beaucoup de cendres et les avaient transformées en une vase boueuse. En raison de cette circonstance, les fouilles, qui d’ailleurs n’ont pas été suffisamment surveillées, ne pouvaient pas être opérées avec beaucoup de méthode. On a retiré pêle-mêle du puits une quinzaine de têtes de chèvres, onze têtes de vaches ou de bœufs appartenant à une petite race. Ces dernières portent toutes les traces du coup de maillet frappé sur la face du crâne, comme on opère dans nos abattoirs. Au fond gisaient trois amphores dont les panses sont intactes. L’une d’elles mesurait 1m,40 de hauteur avec son col dont les débris ont été recueillis.

La découverte la plus intéressante est celle d’un casque en fer qui contenait un crâne humain. Il a la forme la plus simple des galea de légionnaires romains. Le cimier, cylindrique, orné de deux rondelles, est perforé au centre, ce qui indique qu’un panache devait y être fixé. Ce casque a été trouvé à la profondeur de 8 mètres. On a retiré de la même couche un coutelas en fer d’une conservation admirable (longueur totale 0m,30, largeur de la lame 0m,035), dont le manche presque cylindrique (0m,08 de largeur, diamètre 0m,014) est plaqué de corne sur les deux côtés. Ce manche n’a d’autre ornement qu’un motif fréquemment appliqué aux objets gaulois : de petits ronds avec un point au centre. Près du coutelas se trouvait une lance en fer (longueur totale 0m,26). Elle est munie d’une douille et affecte la forme d’une feuille de saule avec un renflement dans le bas.

Un second crâne a été trouvé également à une grande profondeur.