Page:La Revue blanche, t30, 1903.djvu/168

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commença avec 35 à 40 accusés des communes voisines, sous l’inculpation supposée d’incendie volontaire et de destruction de vignes. Il vint pour ce procès un juge spécial, je ne sais d’où ; interrogé par lui, je lui fis la déclaration ci-dessus, que j’ai déjà fait connaître dans la Revista Social, qui se publiait alors à Madrid. Je restai en prison préventive l’espace de vingt mois.

Signé : Manuel Sanchez Alvarez.

Un autre témoignage confirme aussitôt celui-ci, il émane d’un autre habitant de la province, M. Regüera, qui habite aujourd’hui Buenos-Ayres :

S’adressant à des malheureux arrêtés pour des vétilles, il (Monforte) leur promettait l’élargissement, leur offrant en même temps trois pesetas pour qu’ils aillent incendier des meules de blé ou d’orge, les menaçant s’ils refusaient, d’une peine sévère ; quelques-uns acceptaient par crainte, et se rendaient à l’endroit désigné : là, ils trouvaient des gendarmes postés d’avance pour leur mettre la main au collet. Le cas se produisit à cette époque un grand nombre de fois.

Il y en eut à qui on promit, outre l’argent, un bon dîner, mais comme cela ne les décidait pas, la hyène de Monforte les faisait conduire de province en province, jusqu’à ce que lassés de cheminer, ils fussent mis en liberté suivant le caprice d’un gouverneur.

Ceux qui étaient pris comme je l’ai dit plus haut, étaient traités comme affiliés à la Mano Negra.

Le même témoin cite encore les faits suivants :

Monforte se servit d’un individu nommé Antonio Gallardo, dit « Tagurdo », éloquent celui-là, qui lui procura des hommes pour faire un vol d’eau-de-vie, les conduisant à l’une des caves de D. Manuel Gonzalez, dans la Alameda vieja ; dans la cave étaient postés d’avance quelques gendarmes aux ordres du noble Monforte ; ils tuèrent le premier qui se montra, et arrêtèrent les autres, qui furent condamnés au bagne.

Celui qui fut tué était employé d’une boutique de la rue Sol, appelée « La Campana ».

Quant au « Tagurdo », pour que quelque jour il ne pût nuire à D. Tomas, on l’envoya à Tanger (Maroc).

Je déclare, dit encore M. Reguera, que l’inviolable garde civile, dont Oliver était le capitaine, tirait de la prison en pleine nuit de malheureux ouvriers, les conduisait aux champs d’oliviers voisins de la ville, puis, bien attachés, les ramenait à la prison pour leur faire déclarer qu’ils appartenaient à la Mano Negra. En même temps on les obligeait à se reconnaître coupables d’actes auxquels ils n’avaient jamais pensé, et de là les coups de branches d’olivier et les mille tourments pour leur arracher des aveux qui n’étaient que dans l’esprit de leurs bourreaux.

On verra la part que prit cet Oliver au grand œuvre de Mon-