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L’ANGE DE LA CAVERNE

venu à surmonter les difficultés et les horreurs des marais de la Guyane Française ?

Oui, ils le savaient… Cependant, ils allaient essayer, cette nuit même, de s’évader. Ils partiraient, sans armes, sans provisions, excepté quelques croûtes qu’ils avaient pu mettre de côté sur leur pitance journalière… Ils partiraient… L’espoir est tenace au cœur de l’homme et ils espéraient réussir là où tant d’autres avaient échoué…

Depuis deux mois qu’ils travaillaient à leur délivrance. À l’aide d’un couteau ébréché que 818 avait trouvé dans la cour du pénitencier, un jour, ils avaient scié les barreaux de leurs fenêtres. Chaque nuit, 818, de neuf heures du soir à minuit, puis 602 de minuit à trois heures du matin, ils avaient fait ce rude travail. Maintenant, les barreaux étaient sciés et il s’agissait de s’évader.

Du côté des marais, le pénitencier n’est pas gardé. À quoi cela servirait-il, d’ailleurs ?… Les prisonniers savent bien ce qui les attend dans les marais de la Guyane Française ; ils aiment encore mieux rester au pénitencier, aux travaux forcés, à perpétuité. Quelque fois, un gardien, en faisant sa ronde, passe du côté des marais : excès de précaution ; nul ne peut songer à s’évader par là, semble-t-il.

Aussitôt que la garde eut fait sa tournée de chaque soir, les prisonniers 818 et 602 s’agenouillèrent près de leurs lits et continuèrent à causer :

« Tout est-il prêt ? » demanda 818 à 602.

— « Oui, » répondit 602. « N’oublions pas nos provisions de bouche. Je suis parvenu à mettre tout mon souper de côté, ce soir. »

— « Moi aussi, » répliqua 818. « À dix heures juste, nous partirons… Le câble ?… »

— « Le câble est solide ; tout ira bien. »

— « Ne parlons plus maintenant ; nous finirions par attirer l’attention des autres prisonniers et ils donneraient l’éveil. »

— « Nous échangerons le signal convenu, » dit 602. « À bientôt ! »