Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/263

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mées alliées. La persuasion devenant inutile, nous fûmes obligés d’employer la force. Nous le liâmes avec des cordes, pieds et mains, contre des pieux fixés en terre, au milieu de sa tente : les chefs les plus influents le maintenaient et l’exhortaient à se calmer, lui montrant l’imprudence d’exposer le salut de l’armée pour répondre à l’insolente bravade d’un sauvage Wahabi. Cependant celui-ci ne cessait de crier :

« — Qu’il vienne, le drayhy ! voici son dernier jour ; c’est moi qui veux terminer sa carrière. »

Le drayhy, qui l’entendait, furieux de plus en plus, écumait de rage, rugissait comme un lion ; les yeux, rouges de sang, lui sortaient de la tête ; il se débattait contre ses liens avec une force effrayante. Ce tumulte attirait un rassemblement considérable autour de sa tente. Tout à coup un Bédouin, se faisant jour à travers la foule, se présente devant le drayhy. Une chemise liée sur ses reins par une ceinture de cuir, et un caffié sur la tête, formaient son unique vêtement. Monté sur un cheval alezan, et n’ayant pour toute arme qu’une lance, il venait demander à combattre le Wahabi à la place du scheik, en récitant les vers suivants :

« Aujourd’hui, moi, Téhaisson, je suis devenu maître du cheval Hadidi ; je le désirais depuis longtemps. Je voulais recevoir sur son dos les louanges dues à ma valeur. Je vais combattre et vaincre le Wahabi pour les beaux yeux de ma fiancée, et pour être digne de la fille de celui qui a toujours battu l’ennemi. »

Il dit, et s’élance au combat contre le guerrier ennemi.