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chacun de leurs censitaires, un droit de relief extraordinaire fixé au douzième de la valeur de l’objet donné à cens : À la suite de violentes contestations, un arrêt du parlement décida que les seigneurs ne pouvaient exiger de leurs censitaires le droit d’à-cher-prix, à moins de prouver, par titres autres que ceux de la coutume, que ce droit leur était expressément dû. (Encycl. cath.)

ACHÉRY (Dom Luc d’), savant bénédictin, né à St-Quentin, en 1609, mort en 1685. On lui doit, entre autres ouvrages, un vaste recueil de pièces précieuses relatives au moyen âge, chroniques, diplômes, chartes, vies des saints, etc., connu sous le titre de : Veterum aliquot scriptorum qui in Galliœ bibliothecis ... spicilegium, revu et augmenté par de La Barre, 1723.

ACHET s. m. (a-chè — du gr. achetès, bruyant). Entom. Genre d’insectes orthoptères de la famille des coureurs. || On écrit aussi achète.

ACHETABLE adj. (a-che-ta-ble — rad. acheter). Qui peut être acheté : L’esclave, vendable, achetable, était, comme le cheval et le bœuf, la propriété du maître. (Lamenn.)

ACHETANT (a-che-tan) part. prés. du v. Acheter : Nous avons cru bien faire en achetant les créances à soixante pour cent de remise. (Balz.)

ACHÈTE s. m. Entom. V. Achet.

ACHETÉ, ÉE (a-che-té) part. pass. du v. Acheter. Acquis à prix d’argent : Poulain acheté à la foire. Des marchandises achetées à vil prix. Des noirs achetés à la côte d’Afrique. Nos gens en Espagne seront des saints ; on payera tout, et le soldat ne mangera pas une poule qui ne soit achetée au marché. (P.-L. Cour.)

Je gouverne l’empire où je fus acheté.
Racine.

— Par ext. Soldé, gagné par corruption : Applaudissements achetés. Voix achetées. Témoins achetés. Conseils, prêtres, tribuns, furent achetés au prix qu’ils mirent eux-mêmes. (Montesq.)

Retourner à l’armée ! Ah ! sachez que la reine
La sème d’assassins achetés par sa haine.
Corneille.

— Fig. Obtenu avec peine, au pris d’un sacrifice : Tous les plaisirs du monde lui paraîtraient trop achetés, s’ils lui avaient coûté quelque bassesse. (Fléch.) Les plaisirs de la nuit dernière ne lui semblaient point achetés trop cher par le sacrifice de l’innocence et de l’honneur. (Lévis.) Nous ne croyons plus ni au néant de la tombe, ni au salut acheté par un renoncement forcé. (G. Sand.)

L’honneur d’un si beau choix serait trop acheté.
Corneille.

ACHETER v. a. ou tr. (a-che-té — étym. douteuse : du lat. acceptare, recevoir — ou du bas lat. accapitare, prendre à redevance, lequel vient lui-même de ad et caput, tête — ou enfin, ce qui est plus probable, du lat. ad et captare, tâcher d’avoir. Ce qui milite surtout en faveur de ad captare, qui, du reste, comme étymologie et comme sens, est la forme qui se rapproche le plus de acheter, c’est que ce dernier mot s’est écrit successivement achater, achapter et achepter. — Dans aucun cas ce verbe ne redouble le t ; l’e muet du radical achet se change en è ouvert toutes les fois que le t est suivi d’un e muet : J’achète, j’achèterai, que j’achète). Acquérir une chose à prix d’argent, en la payant : Acheter un livre, une maison. Les juges qui ont acheté les charges de la magistrature vendront à leur tour la justice. (Fén.) Vous venez d’acheter à vil prix des diamants de famille qui n’appartenaient pas à ma femme. (Balz.) Il rêve au petit champ de seigle, au maigre pâturage qu’au retour il achètera dans sa montagne. (Michelet.) Le consommateur est d’autant plus riche qu’il achète toutes choses à meilleur marché. (Bastiat.)

— Absol. : Avoir la manie d’acheter. À Constantinople, on arrive sans cesse d’un bazar à un cimetière, comme si les Turcs n’étaient là que pour acheter, vendre et mourir. (Chateaub.) Acheter, c’était un acte civique qui servait très-directement le salut du pays. (Michelet.) Nos Alsaciens qui émigrent vendent le peu qu’ils ont au départ ; le juif est là à point pour acheter. (Michelet.) Surfaire et marchander ne sont pas nécessaires pour bien acheter et bien vendre. (Mich. Chev.)

— Peut avoir un complém. désignant la personne qui cède ou a cédé ; alors, il régit quelquefois la prép. de ou la prép. à, mais plus souvent la prép. chez : Acheter une chose de quelqu’un. Acheter une chose à quelqu’un. Acheter une chose chez quelqu’un. Dans ce dernier cas, il s’agit toujours d’un marchand de profession ; dans les deux autres cas, il s’agit plutôt d’un vendeur par occasion : J’ai acheté de lui cette maison. (Acad.) Quand le fermier veut vendre sa récolte, il s’adresse à un farinier, à un négociant, qui la lui achètent et la lui payent. (Blanq.) || Acheter à quelqu’un signifie aussi Acheter quelque chose pour quelqu’un : Je lui ai acheté un album pour ses étrennes. (Acad.)

Acheter un auteur, Acheter ses œuvres :

Dès que l’impression fait éclore un poëte,
Il est esclave né de quiconque l’achète.
Boileau.

|| Acheter un homme, Lui donner une somme d’argent pour qu’il remplisse le service militaire à la place d’un autre. || Acheter des bans, Obtenir, moyennant une certaine somme, la dispense de faire publier à l’église un ou deux des trois bans de mariage.

— Comm. Acheter comptant, Payer sur-le-champ les marchandises que l’on achète. || Acheter à trente, à soixante, à quatre-vingt-dix jours, Acheter à la condition que l’on ne payera que dans trente, soixante, quatre-vingt-dix jours. || Acheter à terme ou à crédit, À la condition que l’on ne payera que dans un temps déterminé. || Acheter à profit, Acheter suivant le journal d’achat du vendeur, à tant pour cent de bénéfice. || Acheter en gros, Acheter d’une seule fois une grande quantité de la même marchandise. || Acheter en détail, N’acheter d’une chose que de petites quantités à la fois.

— Fig. Corrompre, s’assurer les services de quelqu’un à prix d’argent : Acheter des témoins. Acheter des juges. Trop tôt pour lui, trop tard pour elle, Mirabeau se vendit à la cour, et la cour l’acheta. (Chateaub.) Acheter un député, un écrivain, une femme du monde ! il y faut des façons infinies ; cela demande du tact, de l’adresse. (F. Soulié.) Ne sais-tu donc pas, malheureux, que celui qui achète un assassin lui est vendu ? (F. Soulié.) Maraud ! j’achète tes services et non pas tes leçons. (Etienne.)

Et des mêmes présents qu’il verse dans mes mains,
J’achète contre lui les esprits des Romains.
Corneille.
Jamais on n’eut sur moi de droit si légitime ;
Vous m’avez acheté plus que je ne m’estime.
C. Delavigne.

— Par anal. : Acheter, des voix, des suffrages, un vote. Roderic Borgia acheta publiquement les suffrages de vingt-deux cardinaux, et fut proclamé pape. Celui qui achète un vote ne fait pas un marché moins honteux que celui qui le vend. (E. de Gir.) Quiconque achète une conscience a déjà vendu la sienne. (Mme  C. Fée.)

— Obtenir au prix des plus grandes difficultés, avec beaucoup de peine : Il faut acheter le plaisir injuste au prix des remords. (Mass.) Faut-il acheter le bonheur public par le malheur des particuliers ? (D’Aguess.) Chactas avait acheté la vertu par l’infortune. (Chateaub.)

Nul ne leur a plus fait acheter la victoire.
Racine.
Le seul Agamemnon, refusant la victoire,
N’ose d’un peu de sang acheter tant de gloire.
Racine.

— Prov. Acheter chat en poche, Faire une acquisition sans bien connaître l’objet que l’on achète : Mon bon ami, je ne veux pas acheter chat en poche, et comme tu seras obligé de passer à la visite du conseil de recrutement, je ne veux pas qu’on te refuse pour quelque vice de conformation que je ne connais pas. (F. Soulié.) || Qui bon l’achète, bon le boit, Pour avoir en bonne qualité le vin, les liqueurs, les denrées, il faut y mettre le prix. || Acheter par francs et vendre par écus, Vendre avec un bénéfice excessif.

S’acheter, v. pr. Être acheté, acquis à prix d’argent : Les suffrages des honnêtes gens ne s’achètent pas. Les riches pensent que les talents s’achètent comme une étoffe. (Mme  de Tencin.) Hélas ! dans un temps où l’argent est tout, tout se vend et s’achète. (G. Sand.) Tout cela est moisi, racorni, troué, corrodé, et tout cela s’achète ! (E. Sue.)

Les rois avec de l’or pensent que tout s’achète.
C. Delavigne.

— Fig. Être acquis, obtenu par des sacrifices : La gloire s’achète au prix du bonheur ; le plaisir, au prix de la santé ; la faveur, au prix de l’indépendance. (Boiste.) Toute gloire qui s’achète par l’esclavage ou le sang des hommes est mensonge. (A. Martin.)

ACHÈTERESSE s. f. (a-chè-te-rè-se — rad. acheter). Femme qui achète : Si le poisson est abondant, chaque achèteresse se pourvoit à sa convenance. (Journ.) || Ce néologisme, qui est employé dans quelques localités du Midi, est aussi en usage au palais, où achèteresse désigne juridiquement celle qui achète, et acheteuse celle qui a la manie d’acheter, qui achète à tort et à travers.

ACHETEUR, EUSE s. (a-che-teur, eu-ze — rad. acheter). Celui qui achète, qui veut acheter : On avait fini par le prendre à la ferme pour un homme d’affaires envoyé par quelque acheteur. (G. Sand.) Le vendeur trompe incessamment l’acheteur. (Balz.) Ah ! nous nous trompons, il avait trouvé un acheteur. (Alex. Dum.) Comme on le chicanait sur le prix de ses tableaux avant qu’il les eût finis, ses ouvrages se ressentirent de la mauvaise économie des acheteurs. (Bailly.) Nul n’a droit d’imposer à autrui sa propre marchandise ; le seul juge de l’utilité, ou, ce qui revient au même, du besoin, est l’acheteur. (Proudh.)

Son livre aimé du ciel et chéri des lecteurs
Est souvent chez Barbin entouré d’acheteurs.
Boileau.

— Particulièrem. Celui, celle qui a la manie d’acheter, qui achète sans réflexion : C’est un grand acheteur. C’est une acheteuse intrépide.

— Fig. Celui qui gagne, qui obtient par corruption : L’empire, mis à l’encan par l’armée, trouva un acheteur. (Boss.) L’homme véritablement libre est celui dont la conscience ne trouverait pas un acheteur assez riche pour la faire dévier. (Maquel.)

— Comm. Employé spécialement chargé, dans les maisons de commission, d’acheter pour le compte des correspondants : Les acheteurs sont ordinairement les mieux appointés.

— S’empl. aussi adjectiv. : Qu’arrivera-t-il ? que la partie du capital de cette nation, qui consiste en métaux précieux s’étant écoulée, les nations venderesses en renverront à la nation acheteuse, moyennant hypothèque. (Proudh.)

Syn. Acheteur, acquéreur. L’acquéreur achète des immeubles : Dunkerque fut ajouté à la France par un marché, glorieux à l’acquéreur, et honteux pour le vendeur. (Volt.) L’acheteur se procure des meubles : L’expérience montre que les prix n’ont réellement baissé, au profit des acheteurs, que là où il y avait concurrence entre les vendeurs. (H. Say.)

Antonymes. Débitant, détaillant, marchand, vendeur.

ACHÉTIDES s. m. pl. (a-ké-ti-de — du gr. achetès, bruyant). Entom. Nom sous lequel on désigne la famille des grillons.

ACHETOIR s. m. (a-che-toir — rad. acheter). T. d’argot. Argent, monnaie : Or, si la lorette n’a pas besoin d’acheter, à quoi servent les achetoirs ? (M. Alhoy.)

ACHEUL (Saint-), village du dép. de la Somme, à 2 kil. d’Amiens, célèbre par le collège que les jésuites y avaient établi sous la Restauration. C’est là que professait le célèbre P. Loriquet, dont le nom caractérise assez les tendances rétrogrades dans lesquelles se produisait l’enseignement. Le nom de Saint-Acheul a passé en quelque sorte dans la langue avec l’acception d’un lieu voué aux idées arriérées : C’est un disciple de Saint-Acheul, Il a été élevé à Saint-Acheul, servent à désigner un homme qui a sucé la haine des principes de 89.

ACHEUX, ch.-lieu de cant. (Somme), arrond. de Doullens ; pop. aggl. 718 hab. Fabr. de toiles à matelas et d’emballage.

ACHEVAGE s. m. (a-che-va-je — rad. achever). Techn. Action d’achever, dernière façon que l’ouvrier donne à une pièce. || S’emploie particulièrem. dans la poterie.

ACHEVAL s. m. (a-che-val — de à et cheval). Sonnerie pour faire monter les cavaliers à cheval : Le clairon vient de sonner l’acheval.

ACHEVALÉ, ÉE (a-che-va-lè) part. pass. du v. Achevaler. Qui occupe les deux rives d’un fleuve, qui est établi des deux côtés d’une route : Le régiment était achevalé sur la route.

ACHEVALER v. a. ou tr. (a-che-va-lé — rad. cheval). Art milit. Se dit d’une armée qui occupe les deux rives d’un fleuve, qui est postée des deux côtés d’une route : L’armée achevalait le fleuve.

S’achevaler, v. pr. Être achevalé : L’armée s’était achevalée sur le Rhin.

ACHEVANT (a-che-van) part. prés. du v. Achever : Je le trouvai achevant son travail.

ACHEVANT, ANTE adj. (a-che-van, an-te — rad. achever). Qui a l’habitude d’achever, de finir les choses commencées : Beaucoup d’hommes sont moins achevants qu’entreprenants.

ACHEVÉ, ÉE (a-che-vé) part. pass. du v. Achever. Fini, mené à terme : Ma lettre est achevée. Il est certain que, sans Diderot, jamais l’Encyclopédie n’aurait été achevée. (La Harpe.) Quand sa toilette fut achevée, elle entendit sonner l’horloge de la paroisse, et s’étonna de ne compter que sept heures. (Balz.)

Le règne des forfaits est sans doute achevé.
Delille.

— Fig. Accompli, parfait en son genre : Voilà le principe le plus achevé de votre morale. (Pasc.) Le style de Montesquieu est aussi achevé que naturel et rapide. (Villem.) Un beau visage de femme semble l’ouvrage le plus achevé de la création. (E. Legouvé.) Une éducation achevée lui avait donné mille talents. (A. de Musset.) C’est à Paris que Leibnitz se forma : il n’y fut d’abord qu’un jeune homme d’une grande espérance ; il en sortit presque achevé. (V. Cousin.)

. . . En s’unissant, les talents relevés
Donnent à l’univers les peintres achevés.
Molière.


|| En mauvaise part : consommé, fieffé, etc. : C’est un fou achevé, un scélérat achevé. (Acad.) || Complet, arrivé au comble :

Vous verrez par sa mort le désordre achevé.
Corneille.
Sa femme, ses enfants, les soldats, les impôts,
       Le créancier et la corvée
Lui font d’un malheureux la peinture achevée.
La Fontaine.


|| Exténué, excédé, ruiné : Le voyage qu’elle a fait à Paris la ramène dans Angoulême plus achevée qu’elle n’était. (Mol.)

Vienne encore un procès et je suis achevé.
Corneille.


|| Qui a perdu l’esprit, le sens : Il n’en faut point douter, elles sont achevées. (Mol.)

— Fam. Mis à mort, tué : Il fut blessé à la cuisse dans une embuscade, et achevé par les chirurgiens. (P.-L. Cour.)

— Art culin. Cuit à point, bien assaisonné : Les mets bien achevés sont suaves. (De Cussy.)

— Manég. Se dit d’un cheval parfaitement dressé, qui a passé par tous les degrés de l’école.

— s. m. État d’un ouvrage achevé, qui atteint la perfection du genre auquel il appartient. S’emploie surtout dans les arts plastiques : Cet ouvrage n’est pas d’un achevé satisfaisant ; ce n’est pas ainsi qu’il faut entendre l’achevé.

Syn. Achevé, fini, parfait. Parfait a rapport à la beauté qui naît du dessin et de la construction de l’ouvrage : Nature parfaite ; et fini à celle qui vient du travail et de la main de l’ouvrier : Les ouvrages de la main passaient pour être mieux travaillés, plus finis, en Perse qu’en Turquie. (Volt.) Il n’y a rien à faire à ce qui est achevé : Les cantates de J.-B. Rousseau sont des morceaux achevés. (La Harpe.) Mais achevé a trait à l’ensemble auquel il ne manque rien, et fini aux détails qui ont tous été travaillés, caressés avec amour.

ACHÈVEMENT s. m. (a-chè-ve-man — rad. achever). Accomplissement, exécution entière d’une chose : Un petit accident a retardé l’achèvement de l’ouvrage. (Trév.) Il ne manque plus qu’un portail pour l’achèvement de cette église. (Acad.) L’achèvement d’un ouvrage de broderie leur causait d’innocentes joies. (Balz.)

— Fig. Perfection, réunion de toutes les qualités : Dans les ouvrages de l’art, c’est le travail et l’achèvement que l’on considère. (Boil.) On admire l’achèvement de ce tableau, de cette statue. (Lav.) L’homme a besoin pour son achèvement d’un dernier tour de main appelé instruction. (E. Pelletan.) L’éducation n’est que l’achèvement de l’homme selon le plan tracé par la Providence. (Dupanl.)

— Littér. Ce qui complète le dénoûment d’un ouvrage : La scène d’Horace et de Camille, et tout ce qui suit, fait une seconde action dépendante de la première, et qui en est l’achèvement. (Marmontel.) Dans l’Enéide, la mort de Turnus fait l’achèvement parce qu’elle fait cesser l’action d’Enée. (Le Bossu.)

ACHEVER v. a ou tr. (a-che-vé — rad. chef, tête, bout, extrémité. Il change l’e muet du rad. achev en è ouvert, toutes les fois que la consonne v est suivie d’un e muet : j’achève, j’achèverai, j’achèverais, que j’achève). Terminer une chose commencée : Achever un travail. Achever une maison, un tableau, une statue. Dieu prépare, dès l’origine du monde, ce qu’il achève à la fin des temps. (Boss.) Le mariage était retardé par le temps que demandaient encore les ouvriers pour achever les meubles, les peintures, etc. (Balz.) Le génie commence les beaux ouvrages, mais le travail seul les achève. (Joubert.) Il faut achever ce qu’on a entrepris. (L.-Philippe.) Ce que l’homme commence pour lui, Dieu l’achève pour les autres. (V. Hugo.) L’homme n’achève pas plus le langage qu’il ne l’invente de propos délibéré. (Renan.)

Maudit censeur, te tairas-tu ?
Ne saurais-je achever mon conte ?
La Fontaine.

— Par ext. Accomplir, finir : Je suis venue ici achever les beaux jours et dire adieu aux feuilles. (Mme  de Sév.) Elle n’avait point encore achevé ces paroles, que le masque du favori des rois tomba. (Gilb.) Cet homme achève paisiblement sa carrière, avant que le soleil ait achevé son tour. (Michaud.)

Je n’ai vu luire encor que les feux du matin,
         Je veux achever ma journée.
A. Chénier.


|| Avaler, boire entièrement : Achevez donc au moins votre café, ne vous tournez pas le sang ; regardez comme vous êtes rouge. (Balz.) || Tuer, assassiner, donner le coup de grâce : Le général le fit achever en sa présence. (La Rochef.) Nous voyions passer les morts que la peste venait d’achever. (Lamart.) Vous ne ferez pas cent pas dans la rue sans qu’on vous achève. (Alex. Dum.).

Et nos soldats trahis ne l’ont pas achevé ?
Corneille.

— Fig. Mettre le comble à la situation de corps ou d’esprit : Il ne fallait plus que cette bouteille pour l’achever. Mme  de Vitry et Mme  de Maulny firent bien des caresses à Boileau ; cela l’a achevé : au retour, il ne parlait que de grandes dames et que de la cour. (Tall. des Réaux.) Je suis actuellement avec Platon et Cicéron ; il ne me manque plus l’abbé d’Olivet pour m’achever. (Volt.) Ronsard ne garda plus de partisans que dans l’université, dans les parlements et parmi les gentilshommes campagnards ; l’académie et Boileau l’achevèrent. (Ste-Beuve.)

Souvent pour m’achever il survient une pluie.
Boileau.

— Fig. Mettre la dernière main pour perfectionner : Souvent les auteurs ne se donnent pas la peine d’achever leurs ouvrages. (Trév.) L’étude commence un honnête homme, et le commerce du monde l’achève. (St-Evrem.) Le hasard commence les réputations, l’intrigue les achève. (Beauchêne.) L’homme est chargé d’achever la création. (A. Martin.) || Compléter, consommer : Cette aventure achève sa ruine. Vers 1500, la France, épuisée par Louis XI, semble achever sa ruine en Italie ; la noblesse qui part est obligée de vendre. (Michelet.) On aime à commencer la fortune de quelqu’un, mais jamais à l’achever. (A. d’Houdetot.)

— Avec un infinitif pour complément, il est toujours suivi de la prép. de, qui, alors, est explétive : Encore si tu avais achevé de couper notre bois, je prendrais quelque consolation. (Mol.) Pour achever de vivre, il n’a plus qu’un