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près. M. Janvier de La Motte, qui, sous l’Empire, s’était donné le sobriquet de Père des pompiers, ayant été traduit en justice pour détournement de fonds, vit son premier sobriquet remplacé par le Plus honnête homme du monde, nom que lui donna un témoin à décharge, M. Pouyer-Quertier, en expliquant au tribunal que les détournements dont il était accusé n’étaient que de simples virements et que cela se pratiquait partout.

Mais l’homme qui a la plus nombreuse collection de sobriquets à sou actif est, sans contredit, M. Thiers. Les journaux publiés à Paris pendant la Commune le baptisèrent chaque jour d’un nouveau surnom. Antérieurement, on l’avait déjà nommé : Foutriquet, Montretout, Père Transnonain, et, à-propos des fortifications de Paris, Général TomPouce ; on l’appela tour à tour et simultanément : Attila te Petit, Tamerlan à lunettes, Cœur saignant, Croquemort de la nation, Vieux pandour, Rural 1er, Général Boum, Roi des Versailleux ou des Versaillots, Satrape de Seine-et-Oise, Mirmidon 1er, le Notât, Caméléon, César en raccourci, etc., et Papa Bécon, PapaMoulineaux, Père Saquet, à cause des batteries qu’il avait édifiées au château de Bécon, aux Moulineaux et au moulin Saquet. Depuis le 24 mai 1873, les journaux entretenus par la veuve de Napoléon III ne parlent jamais de lui sans remplacer son nom par cette formule : le Sinistre vieillard. Enfin, pour terminer cette liste déjà longue et qu’on pourrait facilement allonger encore, ajoutons un dernier sobriquet. Pendant le second siège de Paris, un général de la Commune, nommé Bergeret, se rendit ridicule en faisant placarder partout une affiche annonçant aux Parisiens que • le général Bergeret lui-même se transporterait à la porte. Maillot, etc. » À la lecture de cet avis si singulièrement rédigé, les Parisiens partirent d’un éclat de rire homérique. L’homme était toisé, jugé, jaugé, et l’on n écrivit plus le nom de ce général, pour n’importe quelle cause, sans y ajouter le qualificatif lui-même.

SOBRY (Jean-François), littérateur français, né à Lyon en 1743, mort à Paris en 1820. Son droit terminé, il se fit recevoir avo- ■ cat k Paris, entra dans les finances et, destitué à l’avéneinent de la Révolution, retourna dans sa ville natale, où il obtint une place de juge de paix ; puis il devint, à la fin de 1794, secrétaire greffier de la commune de Lyon, revint à Paris occuper une place au ministère de l’intérieur et se déclara théophilanthrope zélé. Renvoyé du ministère après le 18 brumaire, il fut nommé commissaire de police. Ses principaux ouvrages sont : le Mode français (1786, in-8<>) ; le Nouveau Machiavel ou Lettres sur la politique (1788, in-8°) ; Bappel du peuple français à la sagesse (1796, in-go) ; Apologiéde la messe (1797, in-so).

SOBRYA s. m. (so-bri-ia — de Sobry, n. pr.). Bot. Syn. d’ENHVDRE.

SOC s. m. (sok — du bas latin soccus, que l’on regarde communément comme un mot d’origine celtique, en comparant l’irlandais soc, socc, génitif suie, bec, groin, soc, corps pointu en général, d’où socan, armé d’un bec, kymrique suh, sweh, soc et groin, ancien cornique soch, armoricain souck, soh. Ce mot a des affinités étendues, mais son origine primitive reste incertaine. Dans l’ancien allemand, nous trouvons suoha, herse, à côté de seh, sech, soc, et de sahs, anglo-saxon seax, Scandinave sax, couteau. Le russe et le polonais socha, charrue, d’où le russe soshnika, soc, complique encore la question, car, d’une part, l’ancien slave socha ne signifie que colonne, comme le russesoshka, polonais soszka, étai, fourche à étayer, et, de l’autre, le c/i slave correspond dans la règle à s ou sh sanscrit, et parfois à fesh. On ne sait, de plus, si l’o remplace ici un a ou un u primitif. Le sanscrit ne nous vient point en aide ; car ni suka, flèche, ni stlci, aiguille, cône, ne peuvent rendre compte des formes celtiques et slaves, qui ne s expliqueraient que par un thème sûksha, peut-être conservé dans sûkshma, fin, subtil, pointu. Toute conjecture sur l’origine de ces noms du soc et de la charrue reste d’autant plus incertaine que, soit hasard, soit rapport réel, les langues sémitiques présentent ici quelques analogies frappantes dans l’arabe sikkut, soc, sikkin, couteau, hébreu sakkin, sakka, coin à monnayer, clou, tous du radical sakka, shakka, siiaqqa, il a fendu, coupé, percç, divisé, lequel se retrouve même dans l’ancien égyptien sekeu, sekea, labour, cophte skai, skei, labourer, et siki, sike, briser, broyer). Partie de la charrue qui ouvre la terre et creuse le sillon : Le bec d’un soc. L’oreille du soc. Ces terres étaient en friche, c’étaient des landes ; jamais le soc n’y avait passé, n’y était entré. (Acad.) Le soc vient immédiatement derrière le coutre. (M. de Dombasle.) La terre ne produit que sous le soc qui la déchire. (A. Martin.)

Qui forgea le sue était sage,

Et qui fit l’épée était fou.

Lamotte.

— Encycl. Agric. V. charrue.

SOCAGE s. m. (so-ka-je — rad. soc). Péod. Sorte de corvée consistant à labourer les terres do seigneur.

SOCAKI, SEKAKI ou SERAKI (Abou-Yacoub-Yousouf-Seiadj-Eddin al), écrivain que les historiens ont appelé le Quintiien des Arabes, né en 1160, mort en 1226 ou 1229. Il était Persan de naissance, mais il a écrit en arabe son célèbre ouvrage intitulé : Meftah al oloum (Clef des sciences). C’est un ouvrage classique, concernant les institutions oratoires et divisé en trois parties : grammaire, poésie et rhétorique. La bibliothèque de l’Escurial et celle de Leyde possèdent chacune un exemplaire manuscrit de l’ouvrage de Socaki ; celle de Paris possède deux exemplaires delà troisième partie, qui contient l’art oratoire et qui se trouve aussi à la bibliothèque Bodléienne. Les bibliothèques de Paris et de l’Escurial possèdent aussi plusieurs commentaires manuscrits sur cet ouvrage, par des auteurs arabes.

SOCCAGE s. m. (so-ka-je). Techn. Opération qui consiste à faire évaporer l’eau salée pour en obtenir le sel. il Temps que met le sel à se précipiter par cette opération.

SOCCHIEVE, bourg du royaume d’Italie, province d’Udine, district d’Anipezzo, mandement de Tolmezzo ; 2,014 hab.

SOCCIA, bourg de France (Corse), cheflieu de oant., arrond. et à 37 kilom, N.-Ë. d’Ajaccio ; pop. aggl., 789 hab. — pop. tôt., 798 hab. Élève de bétail ; tabac.

SOCCOLANT s. m. (so-ko-lan). Hist. relig. Nom donné quelquefois aux religieux de Saint-François.

— Encycl. Les soccolants formaient une congrégation de religieux franciscains d’une forme particulière, établie par saint Paulet de Foligny en 1368. Celui-ci était un ermite qui, voyant que les habitants des montagnes voisines de son ermitage portaient des socques ou des sandales de bois, prit pour lui-même cette chaussure, et elle fut adoptée par ceux Qui voulurent imiter sa manière de vivre ; de là ils furent appelés soccolanti. Les récolkts et les carmélites ont été chaussés de même.

SOCCOTRIN adj. m. (so-ko-train). Se dit d’une espèce d’aloès. il On dit plus ordinairement succotrin.

SOCCUS s. m. (so-kuss). Bot. Syn. d’artocarpe ou jacquier.

SOCHACZEW, ville de la Russie d’Europe, dans le gouvernement et à 52 kilom. de Varsovie, sur la rive droite de la Bzura ; 2,000 hab.

SOCHER (Joseph), philosophe allemand, né à Pentingen (Bavière) en 1755, mort en 1821. Sa vie n’oiîre aucune particularité remarquable ; on sait seulement qu’il était membre de l’Académie des sciences de Munich et du parlement bavarois. On lui doit : Appréciation des nouveaux systèmes en philosophie (1800, in-8°) ; Esquisse des systèmes philosophiques (1802, in-so) ; Sur les écrits de Platon (Landshut, 1820).

SOCHET s. m. (so-chè — dimin. de soc). Sorte de charrue sans roue.

SOCHO, ville de la Palestine ancienne, dans la tribu de Benjamin, au N. de Jérusalem, entre Bethel et Rama. C’est près de Socho que, suivant la Bible, David tua le géant Goliath.

SOCIABILISER v. a ou tr. (so-si-a-bi-li-zé

— rad. sociable). Rendre sociable.

SOCIABILITÉ s. f. (so-si-a-bi-li-té — rad. sociable). Aptitude k vivre en société : La sociabilité est une disposition naturelle à l’espèce humaine. On remarque dans certaines espèces d’animaux une sorte de sociabilité. (Acad.) La sociabilité de l’homme est l’effet d’un penchant naturel. (Cuv.) Les aniniaux les plus rapprochés de l’homme par l’intelligence, les singes, présentent des instincts de sociabilité bien marqués. (A. Maury.) La sociabilité fonde la société humaine, l’amour la conserve. (Jouffroy.) La femelle est le lien de sociabilité dans toutes les espèces. (Toussenel.) Qu’est-ce que la sociabilité, sinon un attrait réciproque, une affection mutuelle qui a pour objet le bien général ? (Ed. Laboulaye.) La cause de la démocratie n’est autre que celle de la sociabilité même. (Lerminier.) Tous les êtres tendent à la sociabilité. (Alibert.) Le perfectionnement de l’homme est lié à la sociabilité. (Portalis.) L’égoïsme est barbare ; il est la mort de la sociabilité et même de la politesse. (Le P. Félix.) L’amour légitime est un des principes de ta sociabilité. (Maquel.) La sociabilité est comme l’attraction des êtres sensibles. (Proudh.) En violant l’instinct de sociabilité, en se séparant du monde, le saint veut s’élever au ciel, mais son corps l’embarrasse ; pour se faire ange, il se fait brute. (A. Martin.) La sociabilité du genre humain, c’est l’amour des hommes. (A. Martin.) La sociabilité est l’attribut distinctif de notre nature. (Mich. Chevalier.)

— Qualité d’une personne sociable ; aptitude, penchant à fréquenter la société, à rechercher la société de ses semblables : C’est la sociabilité qui abolit ia sincérité, (Rigault.) La sociabilité met une sourdine à la critique, mais ta laissé parler. (Rigault.) Il est naturel d’avoir des égards les uns pour les autres ; ta sociabilité nous y porte. (Roubaud.)

SOCIABLE adj. (so-si-a-ble — du lat. socius, compagnon). Qui est naturellement porté à chercher la société, qui est né propre à vivre en société : L’homme est sociable :. Il y


a des nations plus sociables les unes que les autres. (Acad.) Il n’y a rien de plus sociable que l’hommepar sa nature. (Boss.) Il n’y a rien de plus sociable que l’homme par sa nature, ni rien de plus discordant et de plus contredisant par son vice. (J.-J. Rouss.) La domesticité chez les animaux est un effet de l’instinct sociable. (Cuvier.) Le loup vit dans tes forêts, le chien vit près de l’homme ; l’un vit à peu près solitaire, l’autre est essentiellement sociable. £Cuv.) Tout a concouru à rendre l’homme sociable. (Buff.) Si l’homme est né le plus faible, en revanche il est né le plus sociable de tous les animaux, (pariset.) L’homme est sociable d’instinct, et chaque jour il le devient par raisonnement et par élection. (Proudh.) Le ciel a formé l’homme animal soct’n&Ie.

Voltaire.

Il Qui aime, qui recherche la société de ses semblables : liien de plus sociable que le Parisien.

— Avec qui il est aisé de vivre, qui est d’un bon et facile commerce : C’est un homme sociable. Je le verrais quelquefois s’il était sociable, plus sociable. C’est un bourru, un fantasque ; il n’y a pas d’homme ntoins SOCIA-BLE. (Acad.) L’on est plus sociable et d’un meilleur commerce par le cœur que par l’esprit, (La Bruy.) Trajan vivait en bon et sociable citoyen. (Fén.) L’homme sociable est l’homme par excellence. (De Bonald.) Il Qui appartient, qui a rapport aux personnes sociables : Humeur sociable. Esprit sociable. Caractère sociable. La politesse ne donne pas les vertus, elle les rend sociables. (De Surgères.) Il y u dans le génie français quelque chose de sociable, de sympathique. (Gui 20t.)

SOCIABLEMENT adv. (so-si-a-ble-man

— rad. sociable). D’une manière sociable ; Il s’est conduit assez sociablement. (Acad.)

SOCIAL, ALE adj. (so-si-al, a-le — du latin sociaiis, provenu lui-même de socius, allié, ami, qui représente exactement, selon Eiehhoïf, le sanscrit sakhd, sokyas. ami, de la racine sagy ou sasg, joindre, adhérer). Qui concerne la société -. L’ordre social. La vie sociale. Les institutions sociales. Le contrat social. Le pacte social. Les vertus, les qualités sociales. Les rapports sociaux. (Acad.) Solo» développa dans les Athéniens te germe de toutes les vertus sociales. (Condill.) Il y a tant de contradictions entre les droits de la nature et nos lois sociales, que pour les concilier il faut gauchir et tergiverser sans cesse. (J.-J. Rouss.) Les lois générales du monde social sont harmoniques. (Bastiat.) Il y a des crimes qui, en troublant l’ordre moral, troublent l’ordre social et motivent l’intervention politique. (Chateaub.) Le passage de l’état sauvage à l’état social est une énigme dont aucun fait historique ne donne la solution. (B. Const.) L’ordre social, eu toutes choses, n’est que la raison. (Rossi.) La bienveillance est un sentiment de l’homme social. (Latena.) Les institutions divines et sociales destinent les femmes aux trois états de fille, d’épouse et de mère. (Mme de Rémusat.) La science sociale considère l’activité humaine dans son ensemble et s’intéresse à toutes les branches de cette activité. (J.-N. Bénard.) L’amour est te principe social par excellence. (Maquel.) La liberté de ta presse a le double caractère d’une institution politique et d’une néeqgsité sociale. (Royei-Coliard.) Il n’y a point dans l’ordre social une plus grande difficulté que celle du salaire. (L. Vauuher.) Le mal social ne sera vaincu que par des vérités sociales. (A. de Gasp.) Beaucoup de gens parmi nous croient et espèrent en un Évangile social. (Proudh.) La science sociale est la connaissance raisonnée et systématique de ce qu’est la. société dans toute sa vie, c’est-à-dire dans l’ensemble de ses manifestations successives. (Proudh.) La philosophie sociale est essentiellement la science et la paix. (V. Hugo.) Ce n’est à aucun nom propre que s’adressent les vérités sociales ; c’est à la société elle-même. (Guizot.) Ce qui fait la vie sociale, c’est ta sécurité et le progrès. (Guizot.) Dans l’état social, ta liberté c’est la participation au pouvoir. (Guizot.) Guérir l’intempérance serait attaquer à sa racine te mal social. (Renan.) La richesse est la force Sociale accumulée. (É. Pelletan.) Le droit social est absolu, comme la justice dont il est l’expression. (Vaeherot.) Le droit des plus nombreux, c’est le droit social. (E. de Gir.)

.... Une raison hardie

De l’état social désordonné les rangé.

Deljlle.

École sociale ou sociétaire, École phalanstérienne ou fouriériste.

Science sociale, Science de l’organisation et du développement des sociétés.

Être social, Celui qui vit en société.

— Politiq. Questions sociales, Celles qui se rapportent au développement intellectuel, moral et matériel des masses populaires, en dehors de la politique : Il n’y a plus de questions politiques ; il n’y a plus que des questions sociales. (De Metternicb.) Les questions politiques se tranchent à coups de sabre, mais te sabre est impuissant contre les questions sociales. (E. de Gir.) il Contrat, traité, pacte social, Convention expresse qui règle les droits et les devoirs respectifs d’un peuple et de son gouvernement : La rétroactivité

SOCI

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I rompt la condition du traité social. (B.

Const.)

i... Que dis-tu de ces barbares lois,

Qui, des usurpateurs consacrant l’injustice,

| Du pacte social renversent l’édifice ?

| Dbulle.

il République démocratique et sociale, Celle qui a pour programme des réformes qu’ellé veut apporter à l’état social actuel.

— Hist. rom. Guerre sociale, Guerre que les peuples de l’Italie, alliés de Rome, firent à la république du temps de MariusetdeSylla.

— Comm. Qui concerne les sociétés de commerce : La raison sociale de cette maison. Les engagements sociaux. Le fonds social. Cet associé a la signature sociale de la maison de commerce. (Acad.)

— Hist. nat. Se dit des espèces animales ou végétales qui sont représentées par un grand nombre d’individus réunis dans un espace restreint.

SOCIALEMENT adv. (so-si-a-le-manrad. social}. D’une manière sociale, dans l’ordre social.

— Se dit particulièrement de ce qui a rapport à la science sociale : Il faut que l’anarchie s’universalise pour que le besoin d’ordre stable puisse se faire socialement sentir. (Colins.) L’excès d’anarchie peut seul faire sentir, socialement, le besoin de la vérité. (Colins.) Le droit de la majorité, c’est le droit du plus fort socialement transformé. (E. de Gir.)

SOCIALISATION s. f. (so-si-a-li-za-si-on

— rad. socialiser). Action de socialiser, de mettre en société, u Peu usité.

SOCIALISER v. a. ou tr. (so-si-a-li-zé) — rad. social). Rendre social, réunir en société : Il y a des caractères qu’il est impossible de socialiser.

— Placer sous le régime de l’association : Dès qu’on parle de socialiser la propriété, elle périclite, elle périt. (Proudh.) Se socialiser v. pr. Devenir sociable.

SOCIALISME s. m. (so-si-a-li-sme —du lat. socialis, social). Système de gouvernement qui a pour base un ensemble de réformes sociales : Le socialisme austère de Bousseau et de Mably sacrifie tout à l’égalité. (Frank.) Le bon socialisme, c’est l’anéantissement durable du paupérisme. (Colins.) Le socialisme est le contraire de l’absolutisme social, qui tue la dignité humaine, et de l’individualisme, qui tue la société. (Laurent de 1’A.vdèehe.) J’entends par socialisme un groupe de doctrines et de sectes qui concluaient passionnément à charger l’État du bonheur public. (Dupoot-White.) Le socialisme, c’est le despotisme incarné. (Bastiat.) Le socialisme est de tous les temps. (S. de Sacy.) Le socialisme n’est pas une doctrine déterminée, (V. Considérant.) Le socialisme est dans l’opinion, dans l’air, dans le peuple. (V. Considérant.) Le socialisme affirme l’anomalie de la constitution présente de la société et, partant, de tous les établissements antérieurs. (Proudh.) Le socialisme oppose au principe de propriété celui d’association et se fait fort de recréer de fond en comble l’économie sociale. (Proudh.) Le socialisme envahit sournoisement le domaine de l’industrie, (j. Simon.) Le socialisme, c’est la civilisation. (E. de Gir.) La science est le vrai nom du socialisme, comme la charité fut le vrai nom du christianisme. (E. de Gir.) Le mouvement de 1789 fit du socialisme, comme M. Jourdain faisait de la prose, sans le savoir. (L. Ulbach.)

— Encycl. Dans le passé, l’histoire du socialisme se confond avec celle du communisme (v. ce mot). Il s’en distingue de nos jours en ce qu’il est plutôt une nouvelle économie politique issue du mouvement intellectuel né sous l’influence des principes de 1789. On le voit poindre avec les idées saint-sinioniennes. » Le saint-simonisme, ditun hégélien allemand, M. Charles Grûn, est comme une boîte pleine de semences ; la boite a été ouverte ; son contenu s’est envolé on ne sait où, mais chaque grain a trouvé son sillon et on les a vus sortir de terre l’un après l’autre. Ce fut, en premier lieu, le socialisme démocratique, puis le socialisme sensuel, puis le communisme, puis Proudhon lui-même. »

Ce fut la destinée du saint-simonisme de jeter au vent toutes sortes de ferments, puis de rester les mains vides et de laisser à d’autres doctrines le soin de récolter, ce qui faisait dire au même Charles Grûn : à Le saintsiinonisroe est une pièce de théâtre pleine tout ensemble d’émotions et de bouffonneries. L’auteur q.uitta ce monde avant qu’on eût joué son œuvre ; le régisseur mourut pendant la représentation ; alors les acteurs jetèrent là leurs costumes, reprirent leurs habits de villé et s’en allèrent chacun chez soi. » Ces acteurs furent Pierre Leroux, Fourier, Cabet, Considérant ; chacun devint chef d une doctrine

séparée, élabora le système qu’il était donné à Proudhon de formuler. Les prédécesseurs de Proudhon n’a’vaient envisagé le problème social que sous des aspects particuliers. Proudhon le vit d’ensemble et comprit de bonne heure que le socialisme ne pouvait être qu’un système d’économie politique, enté sur une philosophie. Avant de s’emparer de la société, de remanier ses intérêts généraux et de les réorganiser, il fallait s’emparer des mœurs, c’est-à-dire des croyances, des convictions