Page:Laurent - La Poésie décadente devant la science psychiatrique, 1897.djvu/109

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Qui turbine sur l’ trottoir d’en face.
Oh ! c’te rosse-là, j’y en veux à mort !
Chaque fois que j’descends chez la p’tite
Afin d’lui faire un brin la cour.
V’la l’autre qui ranquille au plus vite :
On ne peut pas travailler dans l’jour.
Tandis que l’autre est si gentille
Que je m’suis fendu d’un cadeau ;
Je lui ai payé une mantille
Pour mettre par dessus son manteau.
Ah ! il a fallu qu’elle casque, ma salope ;
Pour l’acheter fallait du pognon.
Le soir elle tombait en syncope.
— Eh ! feignante, au turbin ou des gnons.
— Pitié, Alphonse, j’sens que j’crève :
— Crève donc, outil de besoin !
Te reposer ? Ça, c’est un rêve !
Veux-tu te patiner, eh ! sagouin !
Ah ! ça, tu te figures donc que je t’aime ?
Mais je n’peux pas t’voir en tableau.
Si je reste avec toi quand même,
C’est parce que tu casques, eh ! chameau !
Moi, t’aimer ! Oui, j’aime ta galette !
Adorer ta gueule ! Ah ! non ! mon œil !
D’abord je r’luque une môme plus chouette,
Pour qui j’casquerais avec orgueil,
La fille du portier. Ah ! la gosse !
La blague pas, ou j’te crève, vois-tu.
Fous-moi le camp, bougre de rosse !
Ma femme jalouse ! Ah ! Elle est bonne !
J’te défends d’chiner la vertu.
Mais c’que j’gobe l’autre, je vous dis que ça
Chaque fois que j’l’a touche, je frissonne.
Qui sait, j’ai peut-être quéque chose là.
Mais v’la qu’en descendant mes étages,
J’vois dans la loge, nom de Dieu !