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collége, auquel cette princesse destina son hôtel de Navarre et un revenu de 2,000 livres pour l’entretien des écoliers. L’évêque de Meaux et l’abbé de Saint-Denis, exécuteurs testamentaires, ayant jugé qu’il était plus avantageux de vendre l’hôtel de Navarre, pour procurer au nouveau collége un emplacement plus commode, achetèrent plusieurs maisons et jardins situés sur la montagne Sainte-Geneviève. Ce collége fut dévasté par les troupes bourguignonnes, au mois de juin 1418. Charles VII en ordonna le rétablissement et Louis XI, en 1464, lui accorda de nouveaux privilèges. Le collége de Navarre était, sous le rapport de l’enseignement, le plus complet de tous les établissements de l’Université. On y suivait, dès le principe, des cours de théologie, de philosophie et d’humanités. Il y avait une société de docteurs comme à la Sorbonne. En 1491, Charles VIII vint au collége de Navarre et assista aux Actes de Vespérie de Louis Pinel et de Jean Charron. Le roi et la cour occupaient le jubé ; la Faculté, les prélats se trouvaient dans la nef. Le duc d’Anjou, depuis Henri III, le prince de Béarn, qui devint Henri IV, et le duc de Guise, fils du Balafré, furent pensionnaires au collége de Navarre. Jusqu’en 1604, le confesseur du roi était supérieur-né de cet établissement ; mais à partir de cette année, ce titre passa au grand aumônier de France. Louis XIII réunit à ce collége ceux de Boncourt et de Tournay ; et le cardinal de Richelieu, qui avait fait ses études au collége de Navarre, y fonda une chaire de controverse. Louis XIV y créa, en 1660, des chaires de théologie morale et de cas de conscience. Une chaire de physique expérimentale y fut aussi établie par Louis XV ; en un mot, cet établissement jouissait d’une si belle réputation, que l’historien Mézerai l’appelait avec raison : l’école de la noblesse française, l’honneur de l’Université. Nicolas Oresme, précepteur de Charles V, le cardinal d’Ailly, le célèbre Ramus et Bossuet avaient fait leurs études au collége de Navarre. Sur le portail, on voyait les statues de Jeanne de Navarre et du roi Philippe-le-Bel, son mari. La chapelle, commencée en 1309, avait été dédiée, en 1373, sous le titre de Saint-Louis. Le collége de Navarre fut supprimé en 1790 et devint propriété de l’État.

« Au palais de Saint-Cloud, le 9 germinal an XIII. — Napoléon, etc… ; décrète : Article 1er. L’École Polytechnique sera transférée au collége de Navarre. — Art. 2e. La paléographie des frères Pyranési sera transférée à la Sorbonne. — Art. 3e. Au plus tard, au 1er vendémiaire an XIV, l’École Polytechnique sera établie dans ledit local du collége de Navarre. Signé Napoléon. »

2e Partie. — École centrale des travaux publics. — École Polytechnique.

Réunir dans la capitale de la France, au centre de toutes les sciences, sous les plus habiles professeurs, l’élite des jeunes gens dont le goût se prononce en faveur des différents corps du génie civil et militaire ; telle fut la pensée-mère qui amena la fondation de l’École Polytechnique. Cette création, toute moderne, empreinte d’un caractère grandiose, ne pouvait avoir lieu qu’au moment où la France, brisant toutes les barrières provinciales, travaillait à constituer son unité administrative. Celui qui le premier parait avoir conçu l’idée de cette grande institution est Prieur de la Côte d’Or. Il communiqua son projet à son ami et ancien camarade Carnot, officier du génie comme lui, membre comme lui du Comité du Salut Public. Selon M. de Fourcy, auteur d’une histoire de l’École Polytechnique, publiée en 1828, l’idée de cet établissement serait d’abord venue à Lamblardie, directeur de l’École des Ponts-et-Chaussées ; celui-ci en aurait parlé à Monge, et ce dernier à Prieur. Cette opinion ne nous parait pas vraisemblable. À peine le Comité du Salut Public eût-il adopté ce projet que Lamblardie et Monge s’effacent et ne reparaissent qu’à l’instant où commence la mise à exécution. On voit au contraire dès le principe, Prieur et Carnot méditer, combiner cette belle création, dont ils étudient les détails comme savants, et dont ils mettent, comme membres du Comité, la pensée fondamentale en harmonie avec celles qui présidaient alors au gouvernement de la France.

Un article du décret de la Convention du 11 mars 1794, portant établissement d’une commission des travaux publics, est ainsi conçu :

« Cette commission s’occupera de l’établissement d’une école centrale des travaux publics et du mode d’examen et de concours auxquels seront assujettis ceux qui voudront être employés à la direction de ces travaux. »

L’ouverture de l’école des travaux publics eut lieu en vertu d’un second décret du 7 vendémiaire an III, stipulant les conditions requises pour être admis dans l’établissement qui prit quelque temps après le nom d’École Polytechnique.

Un concours fut ouvert dans les principales villes de France et l’on admit trois cent soixante élèves qui fournirent les preuves de leur instruction dans un examen sur l’arithmétique, les éléments d’algèbre et la géométrie. On fixa le mode d’enseignement qui a toujours eu deux branches principales : les sciences mathématiques et les sciences physiques.

La loi du 25 frimaire an VIII apporta quelques modifications aux premiers règlements ; nous rappelons ses principales dispositions :

« Article 2. Le nombre des élèves de l’École Polytechnique est fixé à trois cents. — Art. 3. Tous les ans, le premier jour complémentaire, il sera ouvert un examen pour l’admission des élèves. Il devra être terminé le 30 vendémiaire. Cet examen se fera par les examinateurs nommés par le ministre de l’intérieur, lesquels se rendront à cet effet dans les principales communes de la république. — Art. 4. Ne