Page:Le journal de la jeunesse Volume I, 1873.djvu/50

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trielles et commerciales se sont développées, que les voyages de simple agrément sont devenus plus fréquents eux-mêmes, non-seulement ou s’est posé la question, mais les esprits et les imaginations ont travaillé de concert à la résoudre. On comprendra tout l’intérêt qu’elle comporte en lisant les chiffres suivants, extraits de statistiques officielles, Par les gares de Calais, Boulogne et Dunkerque, il y avait déjà en 1835 entre l’Angleterre et la France, à l’arrivée et au départ, un mouvement de 424 340 voyageurs ; en 1867, ce nombre était plus que doublé il atteignait 857 379. Il va en augmentant chaque année. Ces voyageurs, outre leurs bagages non taxés, emportaient avec eux plus de six millions de kilogrammes de bagages taxés.

Sur ce dernier point, il n’y a pas lieu sans limite de se préoccuper des inconvénients du mal de mer ; mais il faut visiter deux lois celle masse énorme de colis, les transporter deux fois, de la gare au navire et du navire à la gare anglaise. Cela est un autre point de wic du problème, qui prend alors une double importance. Car si, des voyageurs et des bagages, on passe au transport et au transbordement des marchandises de toute nature qui suivent la même voie, voici les chiffres qui attestent, combien il serait avantageux de pouvoir éviter les pertes de temps et les frais résultant du mode actuel de transport. Pendant l’année 1867, le tonnage des marchandises de grande vitesse ; entre la France et l’Angleterre a dépassé 17 3110 000 kilogrammes, celui des marchandises de petite vitesse a presque atteint 000 000 000 kilogrammes il s’en faut de peu qu’il ait triplé depuis 1855, et il tend toujours à s’accroître.

Comment faire pour éviter les inconvénients de divers ordres signalés plus haut ?

Faire franchir la Manche aux trains du chemin de fer, aller de Paris à Londres sans changer de voiture ?

Au premier abord, cela parait tout simplement une utopie. C’est hardi, s’écriera-t-on, c’est gigantesque, si l’on veut, mais c’est parfaitement insensé. Cependant, il faut le dire, des hommes sérieux, des ingénieurs d’un grand mérite, ont tenté de résoudre directement celte question.

Les uns voulaient construire sur le détroit un pont immense, dont le tablier métallique, reposant sur des culées et des piliers bâtis en mer, porteraient les trains, tandis que les navires passeraient à toutes voiles sous les arches. l"n pont de plus de 110 kilomètres de longueur, cela ne s’est jamais vu, cela n’est point matériellement impossible..Mais la dépense, mais l’entretien, mais l’inconvénient d’une série de piliers faisant obstacle à la navigation pour lesquels ce seraient comme autant d’écueils ! Un projet de ce genre, étudié par M. Thomé de Gamond, eût exigé l’énorme dépense de quatre milliards de francs. D’autres proposaient de couler en mer une jetée, de combler le détroit auquel ils ne laissaient ça et là que d’étroits passages pour les navires !

Un autre projet, d’une hardiesse non moindre, est dû à l’ingénieur distingué que nous venons de citer. Il ne s’agissait de rien moins que de forer sous la mer une galerie sou le irai ne, un a si e tunnel qui, pion géant sous terre à peu de distance de la côte, de va il reprendre jour, treille et quelques kilomètres plus loin, eu un point voisin de la côte anglaise et transborder les trains sans coup férir, du continent sur le sol britannique. Les moyens d’exécution dans le détail desquels nous ne pouvons entrer maintenant, une longue et sérieuse étude géologique des couches de terrain, sur le fond et au-dessous île la nier, la coopération d’hommes de science el de pratique, tout prouve qu’il y a là uni ; solution possible du problème la dépense évaluée à 15O millions, lui-elle plus grande encore ne serait point sans doute un obstacle, du moins pour l’avenir.

Mais il s’agit du présent, el n ju^ avons hâte d’arriver à une solution plus pratique qui peut suffire, longtemps encore.

Celle solution est bien simple dans son énoncé : elle consiste à construire des bateaux à vapeur de dimensions suffisantes pour recevoir les trains, ceux de voyageurs comme les trains de marchandises, et pour les transborder directement sur les voies ferrées, d’un côté ou d’autre du détroit. Ces bateaux devront à leurs dimensions et à leur tonnage considérable, à leur mode de construction même, une stabilité qui les rendra à peu près insensibles aux secousses des lames. Les mouvements de roulis et de langage étant