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AUGUSTE BRIZEUX.

J’accourus ; mais déjà ma jeune paysanne
Par l’aile avait saisi la mouche diaphane,
Et voyant la pauvrette en ses doigts remuer :
« Mon Dieu, comme elle tremble ! oh ! pourquoi la tuer ? »
Dit-elle. Et dans les airs sa bouche ronde et pure
Souffla légèrement la frêle créature,
Qui, déployant soudain ses deux ailes de feu,
Partit, et s’éleva joyeuse et louant Dieu.

Bien des jours ont passé depuis cette journée,
Hélas ! et bien des ans ! Dans ma quinzième année,
Enfant, j’entrais alors ; mais les jours et les ans
Ont passé sans ternir ces souvenirs d’enfants ;
Et d’autres jours viendront et des amours nouvelles ;
Et mes jeunes amours, mes amours les plus belles,
Dans l’ombre de mon cœur mes plus fraîches amours,
Mes amours de quinze ans refleuriront toujours.

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LES ABEILLES

INSTRUCTIONS DE LA VEUVE À SES FILLES




Laissez leur robe noire aux ruches des abeilles,
Mes filles ; entre nous les peines sont pareilles :
De rouge à votre noce il faudra les couvrir
Pour qu’elles aient aussi part dans notre plaisir.
Ces faiseuses de miel, en faisant leur ouvrage,
Prennent une âme douce et qu’un rien décourage ;
Notre ferme, on dirait, est leur autre maison.