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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


Ils rêvent d’une barque et d’une humble maison ;
L’homme continuera la pêche coutumière ;
Mais, comme il n’ira pas plus loin que l’horizon,
Naïk verra la barque, et Névo la chaumière !

Ils rêvent d’un jardin bien clôturé de houx,
Avec la mer au bas éclaboussant d’écume
Les bandes des fraisiers et les carrés de choux,
De bons choux dont la soupe en bouillant se parfume !

Ils rêvent de petits, gais comme des pinsons,
Avec les cheveux drus et la figure rose,
Auxquels on donnera, pour jouer, des poissons
Quand Névo reviendra de la pêche, à nuit close !

Et le cortège va derrière ces rêveurs,
S’allongeant, s’égrenant, et plein de gaîtés franches ;
Par ce beau temps, les gars ont de douces ferveurs,
Si bien que les chapeaux sont près des coiffes blanches !

Quant aux vieux de la noce, autrefois amoureux,
Maintenant discoureurs et graves personnages,
Ils bavardent sans trêve et se disent entre eux
Qu’ils voudraient bien aussi parfois être moins sages !

La mer est endormie, et le vent a semé,
Par les champs, des bleuets, des thyms et des lavandes ;
Sur la falaise il fait un beau soleil de mai,
Il fait un beau soleil de mai le long des landes !