Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/329

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près d’elle une heure seulement. Dites-lui que je n’ai pas osé lui écrire. Je vous en prie, Thérèse, faites cela pour moi. Je prendrai le train mercredi, deuxième jour de l’an et serai chez vous jeudi. Votre amie jusqu’à la mort.

» Clotilde. »

« — C’est bien cela, dit ma tante. Je n’oublierai jamais l’embarras dans lequel me jeta cette lettre. J’aimais Clotilde, oui, je l’ai toujours aimée, et j’étais émue de voir qu’elle se souvenait de moi. Mais Élisabeth ! comment la faire venir chez moi ? Comment lui dire que Clotilde désirait la voir ? Élisabeth est une vieille maniaque et elle a le cœur un peu dur, pensais-je en moi-même. Elle n’a jamais voulu qu’on lui parlât de sa sœur et certainement elle me fermera la bouche dès que je lui dirai qu’il s’agit de Clotilde. Qu’est-ce qu’il arrivera ? C’est que je me fâcherai, oui, je casserai les vitres, je lui dirai ses vérités, et au lieu de raccommoder les deux sœurs, je me serai tout simplement brouillé avec l’une et l’autre. Voilà ce que je me disais, mon garçon, car je suis vive, et quoique j’aie toujours beaucoup aimé cette singulière Élisabeth, je n’ai jamais pu supporter qu’elle me contredise en rien. Une bonne femme après tout, mais vous savez, sans expansion, concentrée en elle-même. Un moment, je pensai à écrire à Clotilde qu’elle ne devait pas compter sur moi ; mais, sac à papier, envoyez donc promener une amie malheureuse ! J’allai voir Élisabeth. — Non, je n’aurais rien pu faire de plus que d’aller voir Élisabeth pour une pareille chose. Elle s’apprêtait à sortir quand j’entrai chez elle.

« — Lisbeth, lui dis-je, mettez là votre chapeau. J’ai à vous parler.