Page:Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 1881.djvu/323

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et du commerce concentrés. Ce dernier fait est constant et général. Il tient à des conditions naturelles que l’on peut atténuer par des efforts intelligents, sans les faire entièrement disparaître : l’économie des frais généraux quand ils sont distribués sur une grande production ou sur un grand nombre de ventes ; les progrès industriels, le perfectionnement des machines qui exigent pour l’exercice de chaque industrie un plus grand outillage, par conséquent de plus fortes avances de capitaux les moyens d’information, de propagande par la voie des annonces, des envois de prospectus ou d’échantillon, sont tous aussi à l’avantage du grand commerce ; il en est de même des moyens de transport qui d’abord offrent des prix relativement plus faibles pour les grosses expéditions que pour les moindres, et qui en outre permettent à quelques vastes magasins installés au centre du pays de faire rayonner leurs produits sur tout le territoire et même à l’étranger. Ces puissantes maisons peuvent se passer des marchands en gros, des courtiers, même des commis voyageurs elles parlent aux yeux par leurs magnifiques étalages d’objets variés, par leurs prospectus enluminés ou leurs échantillons. Les bazars renaissent ainsi au centre des villes, suivant la coutume orientale. Les progrès administratifs tels que l’amélioration du service postal et du service télégraphique, la diminution du prix de transport des petits colis, travaillent au bénéfice des grandes maisons et leur rendent plus facile l’écrasement des moindres. Cette concentration du commerce de détail porte un coup aux marchands en gros et en demi-gros, aux courtiers, à tous les intermédiaires qu’est-il besoin d’eux avec le télégraphe et de gros capitaux ? Toute une légion d’intermédiaires est donc menacée et à la longue doit, sinon disparaître, du moins se réduire en nombre et perdre aussi une partie de ses bénéfices. Cette concentration n’est pas moins dommageable aux marchands de province ; ceux-ci ont été frustrés de la plus grande partie de leur clientèle de la haute bourgeoisie. Qui ne vient aujourd’hui à Paris et ne connaît le Louvre, le Bon Marché, le Printemps ? Qui, du moins parmi les personnes ayant quelque notabilité,