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CUR CUR CUR


poitrine (cœur et poumon), à cause que ces viscères du cerf se donnaient aux chiens en curée ; mais la forme cuirée et le fait qu’on ne trouve pas corée avec le sens de curée, excluent cette étymologie. Voici un exemple de courée : Le curé incontinent s’en va acheter force courées [mou] de veau et de mouton, et les mit toutes cuire en une grande oulle, desper. Contes, xxxvi.

† CURE-FEU (ku-re-feu), s. m. Instrument pour ôter le mâchefer du fourneau. || Au plur. Des curefeux.

étym. Curer, et feu.

† CURE-LANGUE (ku— re-lan-gh’), s. m. Lame d’ivoire, d’écaillé, de corne, dont on se sert pour racler la langue. || Au plur. Des cure-langues.

étym. Curer, et langue.

† CUREMENT (ku-re-man), s. m. Action de curer les puits, les fossés, etc.

étym. Curer.

CURE-MÔLE (ku-re-mô-1’), s. m. Machine servant à curer un port. || Au plur. Des cure-môles.

étym. Curer, et môle.

CURE-OREILLE (ku-ro-rè-U’, Il mouillées), s. m. Petit instrument dont on se sert pour se nettoyer les oreilles. || Au plur. Des cure-oreilles.

— HIST. xvi" s. Pour une douzaine de curoreilles d’ivoire, à deux sols pièce, de laborde, Émaux, p. 242. À Gilles Suramond, orfèvre du Roy, pour ung estuif d’or garny d’un curedans et un cureoreille, id. ib. Disans cela se pouvoir faire à-tout [avec] une cur’aureille, o. de serres, 497.

étym. Curer, et oreille.

† CURE-PIED (ku-re-pié), s. m. Instrument de palefrenier pour nettoyer le dedans du pied des chevaux. || Au plur. Des cure-pieds.

étym. Curer, et pied.

CURER (ku-ré), v. a. [| 1° Enlever des immondices accumulées. Curer un puits, un fossé, un port. || Curer la charrue, la déharrasser de la terre qui s’y attache. || Curer une vigne en pied, ôter du cep des vignes tout le bois inutile. || Se curer les dents, les oreilles, se nettoyer les dents, les oreilles avec un cure-dent, un cure-oreille. |j Terme d’eaux et forêts. Enlever les branches moites, les chicots, les souches mal venues. || 2° Terme de fauconnerie. Donner une cure à un oiseau. || V. n. Rendre la cure, en parlant de l’oiseau. Le faucon a curé.

— SYN. curer, écurer. Si vous nettoyez quelque chose en le frottant avec du grès, du sable, etc. pour le rendre clair, vous écurez, mais, si vous ôtez d’une concavité quelconque ce qu’elle peut renfermer de sale, vous curez. On doit donc dire et l’on dit:écurer des couteaux, des chandeliers, etc. et curer des puits, des fossés, des rivières.

— HIST. xnrs. Ne sueffre sor toi nule ordure Lave tes mains, et tes dens cure, la Rose, 2176. Et furent les fossés curez dehors et dedans, joinv. 275. || xiv e s. Nous loons un bon homme aucune foiz en disant qu’il ne cure des honneurs mondains, oresme, Elh. 49. Aucune foiz par négligence ou pour ce que l’en n’en cure, sont aucuns ars empirez et oubliez en tout ou en partie par procès de temps, id. ib. v, 4 6. || xv° s. Toutes voies point il [le comte de Foix] n’arresta jusques à tant qu’il lui eust donné cinq coups d’une dague; et puis après commanda le comte .qu’il fust mis dans la fosse, et il le fut, et là mourut, car il fut povrement curé de ses plaies, froiss. ii, m, 40. || xvi" s. Plus on attend, plus s’enracine le mal ; toutesfois il est encores guérissable, moyennant qu’on le cure par les causes plustost que par lesaccidens, lanoue, 254. Gens de bras pour applanir les chemins, bastir ponts à passer les eaux, curer les rivières, amyot, Lucull. 49. Le temps de curer [éinonder] les jeunes arbres est lorsqu’ils sont en sève, pour tant plus facilement en estre leurs plaies recouvertes, o. de serres, 639.

étym. Berry, cuer, nettoyer ; provenç. curar, soigner et curer ; du latin curare (voy. cure). Dans l’ancien fiançais, curer signifiait à la fois soigner, avoir souci, et nettoyer.

† CURET (ku-rè), s. m. Peau de buffle ou d’autre animal servant, dans la dorure de quelque pièce, à frotter les pierres sanguines avec delà potée d’étain

— HIST. xv e s. Ainsi que le suppliant ot lié ses benfs à la charrue, aperceut qu’il avoit oublié son curet dont il curoit sa terre et sa charrue, ducange, curala.

étym. Curer. Dans l’ancien français, curet signifiai ! te qu’on nomme aujourd’hui euroir. | CURETE (ku-rè-f), s. m. Terme d’antiquité. Prj ire de Cybèle.

étym. Koûp-iyte ;, proprement les jeunes, de oi’.’r n jumie homme.

† CURETTE (ku-rè-f), s. f. Terme de chirurgie. Instrument, en forme de cuiller, qui sert à extraire les corps étrangers, et particulièrement de petits calculs de la vessie, après l’opération de la taille. || Terme de couverturier. Petit instrument qui a un manche de bois et des dents de fer, dont on se sert pour curer les chardons qui sont remplis de laine. || Terme de marine. Sorte de gratte servant à nettoyer l’intérieur des pompes. || Terme de métiers. Instrument pour nettoyer un trou de mine. || Outil pour nettoyer le coutre de la charrue. || Outil de bois propre à nettoyer le métal des armes. || Terme de botanique. Nom de plusieurs champignons.

— HIST. xvi" s. Instrument d’argent nommé curette, propre pour l’extraction d’une pierre, sonder s’il y en a d’autres, et aussi pour recueillir et amasser le sable, paré, xv, 45.

étym. Curer.

CUREUR (ku-reur), s. m. Celui qui cure et nettoie les puits, etc.

— HIST. xv e s. Vous savez que devant il y a pailles et fumiers qui sont boutez tous hors des estables des cureurs de chevaulx, le Jouvencel, f° 40, dans lacurne.

étym. Curer.

CURIAL, ALE (ku-ri-al, a-1’), adj. Qui concerne une cure ecclésiastique. Fonction curiale. Droits curiaux. La maison curiale, le presbytère.

étym. Cure 2.

† CURIALE (ku-ri-a-1’), s. m. || Terme d’histoire romaine. Membre de la classe appelée aux honneurs et aux charges des cités sous l’Empire. La seconde classe des citoyens était celle des curiales ou décurions, c’est-à-dire des propriétaires aisés, membres, non du sénat romain, mais de la curie ou corps municipal de leur cité, guizot, Hist. de la civilis. en France, 2° leçon. Aucun curiale ne pouvait, par un acte personnel et volontaire, sortir de sa condition ; il leur était interdit d’habiter la campagne, d’entrer dans l’armée, d’occuper des emplois qui les auraient affranchis des fonctions municipales, avant d’avoir passé par toutes ces fonctions, depuis celle de simple membre de la curie jusqu’aux premières magistratures delà cité, id. ib. Les curiales ainsi enfermés de gré ou de force dans la curie, id. ib. Ils administraient les affaires du municipe, ses dépenses et ses revenus, soit en en délibérant dans la curie, soit en occupantles magistratures municipales ; dans cette double situation, les curiales répondaient non-seulement de leur gestion individuelle, , mais des besoins de la ville, auxquels ils étaient tenus de pourvoir eux-mêmes, en cas d’insuffisance des revenus, id. ib.

étym. Latin, curialis, de curia, curie. Vers la fin de l’empire curialis avait reçu parfois le sens de courtisan ; ce sens fut repris dans la latinité du moyen âge ; et au xv e siècle on voit, dans le français, ciirial avec le sens de courtisan : Ocurial, tant en court a d’envie Et de tourment qui d’accroistre ne cesse,. Que dire puis partout sans villenie : Foulz la poursuit, et sages la delesse, eust. desch. Poésies mss. f° 26, dans lacurne. Dieux, qu’à ces cours ont de dueil et de peine Ces curiaux qui dedans sont boutés, id. ib. f° 103. Cet emploi de curial vint d’une confusion avec une fausse étymologie de cour (voy. cour).

† CURIATE (ku-ri-a-f), adj. Terme d’histoire romaine. Qui se compose de la réunion des curies. Comices curiates. || Qui est voté par les curies assemblées. Loi curiate.

étym. Lat. curiatus, de curia, curie.

curie (ku-rie) s. f. || 1) Terme d’antiquité romaine. Division de la tribu chez les Romains. Romulus partagea le peuple romain en trois tribus, et chaque tribu en dix curies ; mais il n’y avait de curies que pour le peuple de l’enceinte de Rome ; et voter par curies, c’était voter en appelant seulement au vote les gens de la ville. Le peuple chercha toujours à faire par curies les assemblées qu’on avait coutume de faire par centuries, et à faire par tribus les assemblées qui se faisaient par curies, Montesq., Esp. XI, 14. || Comices par curie, l’assemblée des patriciens, Ampère, Hist. rom. à Rome, t. II, p. 332. Les curies n’étaient composées que de gentes [familles] patriciennes ; elles se rassemblaient dans le Comitium, ID. ib. Chaque curie avait une voix qui exprimait l’opinion de la majorité de ses membres, ID. ib. Le lieu où s’assemblait le sénat. || 2° Par extension, le sénat des villes municipales. La classe des curiales. || 3° Ensemble des diverses administrations qui constituent le gouvernement papal.

étym. Latin, curia, curie, et édifice consacré à une curie, lieu d’assemblée. Les étymologistes la-


tins dérivent curia de cura, soin ; mais ceux d’aujourd’hui pensent qu’il n’est guère possible de séparer curia de centuria, et que, celui-ci étant une contraction de centumviria (voy. CENTURIE), celui-là doit être une contraction de co-viria, de cum, avec, et vir, homme : réunion d’hommes.

CURIEUSEMENT (ku-ri-eû-ze-man), adv.||l° Avec soin. Aussi bien, que sert-il de regretter des plaisirs absents et de chercher curieusement tous les défauts de sa condition ? balz. Liv. vu, lett. 26. Les Egyptiens conservaient curieusement les corps morts, boss. Hist. m, 3. Un autre décrit curieusement el fort au long les petites choses, et passe légèrement sur les grandes, rac. Extrait du Traité de Lucien : Comment il faut écrire l’histoire. Ceux de ses auditeurs qui auraient le mieux entendu finesse, auraient jugé, non sans fondement, que cette manière de s’exprimer, si curieusement éloignée de la forme ordinaire, renfermait implicitement un trait de satire trop aiguisé pour être senti par la multitude, d’ai. emb. Œuvres, t. x, p. (20, note 3, dans pougens. || Avec soin et délicatesse. Tablette curieusement sculptée. || 2° Avec curiosité, avec désir de voir et de savoir. Observer, s’enquérir curieusement.

— HIST. xn e s. E à ordener coriosement chascone part covient à celui qui fait l’estoire [l’histoire], Machabées, n, 2. ||xni e s. Il m’est avis que c’est resons, porce que cascunsgart plus curieusement celi dontil est hoirs, beaum. lxix, 2. ||xiv’s. Elle [une voie] estoit moult curieusement gardée, Chron. de St-Denis, f° 471, dans lacurne. Punissez-les des peines dessus contenues hastivement et curieusement, Ordonn. des rois de Fr. t. n, p. 88. || xv e s. Et si disoit-on que plusieurs femmes y alloient curieusement de nuict et de jour, jean de troyes, Chron. 1478. || xvi e s. Il nourrit curieusementla mère d’Eudamidas, mont, i, 246. Personne n’est exempt de dire des fadaises ; le malheur est de les dire curieusement, id. t. ni, p. 4, dans lacurne. Entre ceux qui sont adonnez (mais trop curieusement) à la poursuite de divers objets, lanoue, 458. Il fauttraicterce mal bien curieusement, de peur de faire tomber le malade en convulsion, paré, xv, 24. Des confitures et issues de tables curieusement labourées et apprestées, amyot, Lucull. 80. Sans mot dire, ny curieusement enquérir ny chercher que c’es’.oit, id. Crassus, 7.

étym. Curieuse, et le suffixe ment ; provenç. curiosamen ; espagn. et ital. curiosamente.

CURIEUX, EUSE(ku-ri-eû, eû-z’), adj. ||i°Quia cure de, soin de, souci de. Il est vrai que Platon, curieux observateur des antiquités, fait le royaume de Troie, du temps de Priam, une dépendance de l’empire îles Assyriens, boss. Hist. ni, i. On peut croire que les Assyriens étaient peu connusducôtéde l’Occident, puisqu’un poêle [Homère] si savant et si curieux d’orner son poëme de tout ce qui appartenait à son sujet, ne les y fait point paraître, id. ib. Ceux qui connaissent tant soit peu les antiquités savent combien les premiers temps étaient curieux d’ériger et de conserver de tels monuments et combien la postérité retenait soigneusement les occasions qui les avaient faitdresser.iD.tb.il, 3. Peu curieux à bien remarquer ce qui paraît, mais profond à pénétrer ce qui se cache, st-évrem.ii, 454. Elle n’est curieuse que d’une propreté fort simple, mol. l’Av. n, 6. Et le cheval qu’à l’herbe on avait mis, Assez peu curieux de semblables amis [le loup et le renard]… la font. Fabl. xn, 4 7. Il y a des âmes sales, pétries de boue et d’ordure, éprises du gain et de l’intérêt, comme les belles âmes le sont de la gloire et de la vertu ; curieuses et avides du denier dix ; uniquement occupées de leurs débiteurs… la bruy. vi. Les mœurs dans cet âge [l’enfance] sont assez les mêmes, et ce n’est qu’avec une curieuse attention qu’on en pénètre la différence, id. xi. Il semble souvent que nous soyons plus curieux de montrer que nous savons beaucoup de choses, que de faire voir que nous savons bien celles que nous traitons, condillac, Art d’écr. iv, i. || En parlant des choses. [Il] Examine d’un œil et d’un soin curieux Où les vagues rendront ce dépôt précieux, corn. Pomp. n, 2. C’est les examiner d’un soin trop curieux, rotr. Venceil. iv, i. Vous voulez qu’on évite un soin trop curieux. El des vains ornements l’effort ambitieux, la font. Fabl. v, 4. Une espèce de miséricorde inquiète et curieuse, qui songe à tous les maux qu’on peut souffrir, fléch. m, 380. || 2— Oui est désireux de voir et de savoir. Je suis curieux de voir la fin de cette affaire Si Votre Majesté Est curieuse de beauté, Qu’elle fasse venir mon frère, la font. Joc. Nos soldats furent curieux de voir le pays, fén. Tél. x Curieux, incertains, quelle fortune aurait courue