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OWEN ET LUNET OU LA DAME DE LA FONTAINE

Pendant qu’il était ainsi occupé, il entendit un grand gémissement, puis un second, puis un troisième, tout près de lui. Il demanda s’il y avait là une créature humaine. « Oui, assurément, » fut-il répondu. — « Qui es-tu ? » dit Owein. — « Je suis Lunet, la suivante de la dame de la fontaine. » — « Que fais-tu ici ? » — « On m’a emprisonnée à cause d’un chevalier qui vint de la cour d’Arthur, pour épouser ma dame ; il resta quelque temps avec elle, puis il alla faire un tour à la cour d’Arthur, et jamais plus il ne revint. C’était pour moi un ami, celui que j’aimais le plus au monde. Un jour, deux valets de la chambre de la comtesse dirent du mal de lui et l’appelèrent traître. Je leur dis que leurs deux corps ne valaient pas le sien seul. C’est pour ce motif qu’on m’a emprisonnée dans ce vaisseau (1) de pierre, en me disant que je perdrais la vie s’il ne venait lui-même me défendre à jour fixé. Je n’ai plus que jusqu’après demain, et je n’ai personne pour aller le chercher : c’est Owein, fils d’Uryen. » — « Es-tu sûre que si ce chevalier le savait, il viendrait te défendre ? » — « J’en suis sûre par moi et Dieu. » Quand les tranches de viande furent suffisamment cuites, Owein les partagea par moitié entre lui et la pucelle. Ils mangèrent et s’entretinrent jusqu’au lendemain.

Le lendemain, Owein lui demanda s’il y avait un lieu où il pourrait trouver nourriture et bon ac-

(1) Pour vaisseau traduisant llestyr, v. notes critiques, p. 181.