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jadis les tyrans Barbares. Les « riches », comme on les appelle souvent sans bienveillance dans les classes plus humbles, les « riches », mais ce sont précisément ceux-là au contraire qui auraient eu le moins à souffrir des tyrannies et rapacités du Monstre de Berlin, les travailleurs pauvres se seraient affaissés plus vite encore sans les terribles saignées allemandes.

Chers petits enfants de France, prenez le temps de la lire, cette brochure, bien qu’elle soit infiniment moins attrayante que les jolis livres qui vous seront donnés en même temps le jour de vos distributions de prix. Lisez la, car elle n’est pas œuvre de haine, mais de vérité et de justice. Que ceux d’entre vous qui ont eu le bonheur de ne pas naître dans nos provinces envahies, que ceux qui ont même été préservés de voir nos effroyables dévastations, en trouvent ici le compte-rendu, que je viens d’écrire d’après nature, aux Armées, avec un grand effort d’exactitude.

Chers petits enfants de France, je ne vous demande pas, quand le sort des armes aura tout à fait tourné, d’aller vous venger, de l’autre côté du Rhin, et de faire là-bas ce que je vous raconte qu’ils ont fait chez nous. Non laissez cela aux officiers et aux soldats d’un Kaiser, — et du reste, n’est-ce pas, vous n’en seriez heureusement point capables. Mais cependant n’oubliez jamais. Ces gens d’Allemagne, je vous assure, ne sont pas des hommes dignes de fraterniser avec vous. Plus tard, quand ils tenteront de revenir encore s’insinuer cauteleusement à notre foyer, fermez bien vos portes. Gardez-vous d’eux toujours, comme des loups et les vampires. Et tâchez que désormais notre bien aimée patrie, instruite enfin par l’excès de ses malheurs, reste uniquement et plus que jamais française.

Pierre Loti,
Juillet 1917