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NOTICE

mourra le premier, et Lucidas demandera la main d’Arthémise ; mais elle lui sera refusée : Mme de Thermes ne se soucie point de remplacer son brillant mari par ce soldat de bonne race, certes, et poète, mais gauche, provincial, et qui sait mal se déclarer autrement que la plume à la main. En effet, il est bègue et ne peut arriver à prononcer ni les r, ni les c ; si bien que plusieurs fois, dit Tallement des Réaux, « il a été contraint d’écrire son nom pour le faire entendre. » Il se consolera en épousant, un peu plus tard, une jolie tourangelle, sa voisine de campagne, auprès de qui, retiré du service, il passera de longs et heureux jours, en son château de La Roche-Racan. Là, il réalise tout ce qu’il rêvait autrefois lorsqu’il écrivait ses admirables stances Sur la retraite ; il jouit, chaque avril, de cette Venue du printemps qui lui a inspiré jadis des vers si frais et si mélodieux ; il se remet à la poésie en rimant les psaumes, sans vouloir toutefois paraphraser à son tour les deux que Malherbe a paraphrasés, ce qui est un bien joli trait de délicatesse ; il ne quitte guère la Touraine que pour prendre part, de temps en temps, aux séances de l’Académie Française ; enfin, comme le sage de ses stances, il meurt « dans le lit où ses pères sont morts, » à quatre-vingts ans.

François de Maynard était né à Toulouse, en 1582, d’une vieille famille de robe. Il étudia le droit à son tour, dans la ville dont les Jeux Floraux avaient fait la métropole poétique du Midi de la France ; et il avait écrit déjà beaucoup de vers lorsque, durant un voyage que Henri IV fit dans le Quercy (1605), on le présenta au roi, qui le nomma « secrétaire des Commandements et de la Musique » de la reine Marguerite de Valois, sa première femme. Chez elle, où Malherbe ne se montrera que beaucoup plus tard, l’influence de Desportes prédomine encore, et elle s’exerce d’abord au détriment de l’originalité, sur le jeune poète qui, plus tard, condamnera les élégies et les sonnets de sa première manière, bien qu’ils aient obtenu un succès considérable. À la mort de Marguerite, il passe à la cour de Henri, se lie avec Malherbe, apprend de lui à « écrire difficilement des