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LES ÉLÈVES D’INGRES’[1]
On a dit, Messieurs, que mon atelier était une église ; et bien oui ! qu’il soit une église, un sanctuaire consacré au culte du beau et du bien et que tous ceux qui y sont entrés et qui en sortent réunis ou dispersés, que tous mes élèves enfin, soient partout et toujours les propagateurs de la vérité.
Ingres

Il se pourrait que nous fussions à la veille d’une période d’art classique. D’excellents esprits l’entrevoient. Toutes les tentatives récentes d’art construit, tous les essais de simplifications voulues, toutes les recherches de synthèse et de style, n’auraient aucun sens s’ils ne représentaient la réaction nécessaire contre les excès ou les frivolités de l’Impressionnisme, ou contre ces vaines théories qui tiennent toute expression d’une émotion individuelle pour une manifestation de Beauté.

Cela suffit à expliquer qu’on découvre ici, déjà, les élèves d’Ingres. Ils auront un attrait pour tous ceux que préoccupe le souci d’une méthode. Les méditations sur la méthode classique où nous incita le séjour de Rome, eux aussi les ont faites et nous les referons avec eux.

On nous avait enseigné dans les académies Bastien-Lepage, ou l’Empirisme ; et c’est pourquoi nous n’avons cessé de réclamer une tradition et une doctrine. Les Maîtres du Louvre, l’antiquité, l’art populaire, l’exotisme, la science, les philosophies, nous avons tout interrogé. Nous ignorions que, tout près de nous, une grande école déjà oubliée avait été agitée des mêmes inquiétudes, et qu’elle pensa renouer comme nous, mais sous une austère discipline, la Tradition interrompue. M.  Ingres aura été le grand professeur du

  1. L’Occident, juillet, août, septembre 1902.