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les pirates de la mer rouge

— Je ne connais pas le roi des Nemsi, comment veux-tu qu’il s’entende avec moi autrement qu’en t’envoyant de l’argent pour me payer ?

— Il te fera parler par le consul.

— Je ne connais pas non plus le consul des Nemsi ; il demeure à Constantinople, près du Grand Seigneur ; ici il n’y a point de consul.

— Mais je possède un bouyouroultou, je marche à l’ombre du sultan. »

Le pirate se mit à rire.

« Ici on ne connaît pas le padischah ; le grand chérif de la Mecque a seul autorité sur nous ; mais ce n’est ni avec toi ni avec le Grand Seigneur que je veux traiter de ta rançon.

— Avec qui donc ?

— Avec les Anglais : ils ont pris mon frère dans l’attaque d’un de leurs vaisseaux, je veux t’échanger pour lui.

— Ne te flatte pas d’une espérance vaine sans doute ; je ne suis point Anglais, je ne sais si l’échange serait consenti.

— S’ils le font mourir, tu mourras aussi ; prépare-toi donc à écrire une lettre pour leur demander l’échange. Si tu écris mal, tu périras ; ainsi réfléchis à ta lettre, pour qu’elle parle bien. Du reste, tu as du temps devant toi.

— Combien de jours ?

— La mer devient mauvaise ; cependant je voyagerai même la nuit, autant que possible. Si le vent ne nous est pas trop contraire, nous serons dans quatre jours à Djeddah ; de là aux environs de Sanah, où je veux mettre mon vaisseau à l’abri, il y a encore quatre jours ; tu as donc plus d’une semaine pour préparer ta lettre et pour y réfléchir ; c’est de Sanah que je l’enverrai par un courrier.

— J’écrirai cette lettre.

— Et tu me promettras de ne pas chercher à t’évader ?

— Non, je ne puis te promettre cela. »

Il me regarda pendant quelques minutes avec colère, et s’écria :

« Allah Akbar ! Dieu est puissant ! je ne savais pas qu’il y eût d’honnêtes gens parmi les chrétiens ! Ainsi tu veux t’enfuir ?

— Oui, si j’en trouve l’occasion.

— En ce cas nous ne nous exercerons pas ensemble à jouer des armes, tu pourrais me tuer, puis te sauver en nageant. Tu sais nager ?