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Égalité ; nom étrange ! vraie caricature ! On l’appela Prince-Égalité !

Ce n’était pas un médiocre tour de force de défendre une telle fortune à travers 1793. Orléans n’y épargna rien. Il s’assit tout près de Marat. Il se fit l’effort (pénible pour lui, il n’était pas né sanguinaire) de voter la mort de Louis XVI. Au total, il réussit à ce qu’il voulait avant tout, il sauva l’argent et ne perdit que la tête.

Lui-même, il était peu dangereux ; ses fils l’étaient. On a vu comment les bulletins de Valmy et de Jemmapes avaient été combinés pour les faire valoir, exagérer leurs services. Le mari de Mme de Genlis, Sillery, trouva moyen d’être des trois commissaires envoyés à l’armée après Valmy, voulant sans doute tâter les Prussiens sur les chances qu’auraient les Orléans d’être acceptés de l’Europe.

Ce fut alors ou peu après qu’on publia, pour l’édification du public, un curieux journal du jeune duc de Chartres, où l’excellent élève de Mme de Genlis lui écrivait, jour par jour, comme à sa mère, toutes ses belles actions : visites aux hôpitaux, saignées faites aux malades, noyés retirés de l’eau, un homme sauvé de la fureur du peuple, etc.

Les Roland n’avaient pas tort de voir là un prétendant. Ils croyaient qu’on n’attendait que la mort de Louis XVI et l’anarchie qui suivrait, pour faire descendre de la machine un Dieu sauveur, ce jeune homme dont la popularité était si délicatement, si habilement soignée. Tout leur tort était de croire