Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/414

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devant lui le fleuve, avec deux départements, et il en a deux derrière. Ceux-ci, sombres et muets, sans route alors, sans fleuve navigable, regardaient toujours vers la Loire, la lumière et le grand passage. Saint-Florent, avec Ancenis, est comme une petite fenêtre par où l’aveugle Vendée regardait au carrefour des départements de l’Ouest.

Au canon de Saint-Florent s’éveillèrent peu à peu les cloches de l’Anjou et du Poitou. Déjà, dans la basse Vendée, autour de Machecoul, le tocsin sonnait, depuis dimanche, dans six cents paroisses. En montant vers le Bocage, à Montaigu, à Mortagne, il sonnait dans tous les villages qui couronnent les collines. Il sonnait autour de Cholet et remplissait la ville de terreur. Les communications étaient interrompues ; les courriers ne passaient plus. Toute la masse des paysans, cent mille hommes déjà peut-être avaient quitté les travaux. Outre la réquisition, il y avait, pour monter les têtes, les solennités du carême. Pâques approchait. Les femmes remplissaient toutes les églises. Les hommes s’amassaient au parvis, muets… Les cloches assourdissantes ne permettaient pas de parler ; elles enivraient la foule, elles remplissaient les airs d’une électricité d’orage.

Que faisait Cathelineau ? Il avait très bien entendu le combat de Saint-Florent, les décharges du canon. Il ne pouvait ignorer (le 12) l’affreux massacre qui (le 10) avait compromis sans retour dans la révolte le littoral vendéen. N’eût-il rien su, le tocsin se faisait assez entendre. Tout le pays semblait en mou-