Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t5.djvu/463

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CHAPITRE XIV.


DE CE QU'ON APPELAIT CENSUS.


Lorsque les Barbares sortirent de leur pays, ils voulurent rédiger par écrit leurs usages ; mais comme on trouva de la difficulté à écrire des mots germains avec des lettres romaines, on donna ces lois en latin.

Dans la confusion de la conquête et de ses progrès, la plupart des choses changèrent de nature ; il fallut, pour les exprimer, se servir des anciens mots latins qui avoient le plus de rapport aux nouveaux usages. Ainsi, ce qui pouvoit réveiller l’idée de l’ancien cens des Romains [1], on le nomma census, tributum ; et, quand les choses n’y eurent aucun rapport quelconque, on exprima, comme on put, les mots germains avec des lettres romaines : ainsi on forma le mot fredum dont je parlerai beaucoup dans les chapitres suivants.

Les mots census et tributum ayant été ainsi employés d’une manière arbitraire, cela a jeté quelque obscurité dans la signification qu’avoient ces mots dans la première

  1. Le census étoit un mot si générique, qu'on s'en servit pour exprimer les péages des rivières, lorsqu'il y avoit un pont ou un bac à passer. Voyez le capitalaire III de l'an 803, édit. de Baluze, p. 395, art. I, et le Ve de l'an 819, page 616. On appela encore de ce nom les voitures fournies par les hommes libres au roi ou à ses envoyés, comme il paroît par le Capitulaire de Charles le Chauve, de l'an 865, art. 8. (M.)