Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/133

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mousses et de feuilles sèches, grossissant dans leur chute comme des avalanches.

À travers les feuillages clairsemés, on entrevit bientôt le miroitement des eaux prochaines.

Ils débouchèrent dans une grande prairie, qui s’étalait au fond du val. Au sortir du bois, la lumière était aveuglante. La Moselle coulait, lente, entre des îles herbeuses, presque noyées, dont les bords étaient obstrués de roseaux, sans cesse animés d’une vibration monotone.

On aperçut au loin une barque se détachant en noir sur la réverbération des eaux éclatantes. Une silhouette vigoureuse se dressait à l’avant, jetant un filet dans le flot. Le cœur de Marthe se mit à battre désespérément, car elle avait reconnu Pierre.

Le vieux garde fronça le sourcil :

— Tiens, y sont là, eux autres… allons-nous-en…

Et ils rentrèrent sous le couvert.

Ils revenaient lentement au soir, suivant la large avenue où le sol disparaissait presque sous la poussière des gramens tremblotants. La forêt autour d’eux était pleine d’ombres et les troncs des bouleaux luisaient vaguement. Parfois une feuille sèche suspendue à une branche remuait encore faiblement, et cela faisait un grand bruit dans tout ce silence.

Ils s’arrêtèrent un moment à la lisière du bois. Une fraîcheur montait des champs assoupis, plus douce au sortir de l’air étouffant, qui stagne sous le couvert des grands arbres. Le vieux garde s’épongeait le front et Marthe respirait à pleins poumons, assise sur une borne rongée de terre et de mousse, comme il s’en trouve à l’entrée de chaque sente.