Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome II 1921.djvu/217

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
212
MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

à sa nièce de la demande et de la réponse, fondée, comme à l’ordinaire, sur ce qu’elle ne voulait pas se marier.

« Vous vous êtes trompé, mon oncle, je ne voulais pas épouser les autres ; mais je veux épouser monsieur d’Osmond. »

Monsieur de Bongard pensa tomber à la renverse. Il fallut bien reprendre ses paroles, mais tous ses soins furent employés à retarder le mariage. Soit qu’il se flattât de quelque circonstance qui pût le faire rompre, soit qu’il eût besoin d’un long intervalle pour régulariser l’illégalité de la gestion de sa tutelle, portée à un point fabuleux autant, je crois, par incurie que par malversation, il épuisait tous les prétextes pour gagner du temps.

Les jeunes gens, en revanche, étaient très pressés et me demandaient de rester de jour en jour, prétendant que mon départ fournirait un argument de plus à monsieur de Bongard pour éloigner la noce. Il en vint pourtant à ses fins, car le mariage, arrangé au mois de février et qui devait, s’accomplir le premier, le dix, le vingt de chaque mois, n’eut lieu qu’en décembre.

Quoique le mariage de mademoiselle Destillières fût de toutes les nouvelles du jour celle qui m’intéressait le plus, je m’occupais encore cependant des événements publics ; et je fus très consternée, un matin, en apprenant que le roi Louis XVIII était très mal. Il donna de vives inquiétudes pendant un moment.

La loi d’élection se discutait à la Chambre des députés. Les princes étaient en opposition directe au gouvernement, car alors le cabinet était composé de gens raisonnables. Monsieur le duc de Berry ameutait contre la loi et, dans une soirée chez lui, cabala tout ouvertement pour grossir l’opposition. Le Roi en fut informé, le fit appeler, et le tança vertement.