Page:Naudet - Notice historique sur MM. Burnouf, père et fils.djvu/21

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protecteur ! Il s’y serait présenté avec confiance, lui disant : « Me voilà ! » Mais Gardin Damesnil, suspect d’incivisme, avait été forcé de fuir sa patrie, où il ne rentra, dix ans après, que pour rendre sa dépouille mortelle à la terre natale.

Quelques-uns des camarades du jeune Burnouf, en partant pour les vacances, le rencontrèrent prêt à partir aussi, mais sans espoir et sans but. Eux, ils avaient encore leur père, leur mère, une famille, le foyer domestique, les champs paternels. Pour eux, les vacances, c’était le délassement, la joie ; mais lui, qu’allait-il devenir ? Cet âge n’est pas toujours sans pitié, surtout sans instinct généreux, et une hospitalité cordiale et délicate fut le premier témoignage d’estime offert à son mérite. Mais le fils du tisserand avait le cœur noble et fier ; il lui semblait que, s’il jouissait trop longtemps de cet honorable accueil, il cesserait d’en être digne.

Cependant, par un décret du 15 septembre, les collèges de plein exercice, en même temps que les facultés de médecine, des arts et de droit, venaient d’être supprimés sur toute la surface de la République. Ce sont les termes du législateur. « Il ne s’agit pas, disait-on encore, de décréter un plan d’éducation, mais bien de chasser des collèges l’aristocratie qui y règne, et d’élever à la place de l’Université des écoles d’arts et métiers[1]. »

On détruisait, en effet, l’aristocratie des lettres et de la science ; mais on n’élevait point d’écoles.

Le jeune Burnouf se déroba aux instances de ses amis et de leurs familles qui s’efforçaient de le retenir. Peut-être en ce moment, parmi ses souvenirs classiques dont

  1. Moniteur du 19 septembre 1793, p. 1110.