Gœthe est le dernier Allemand pour qui j’ai du respect : il aurait ressenti trois choses comme je les ressens moi-même, nous nous entendons aussi sur « la Croix »…[1] On me demande souvent pourquoi j’écris en allemand ; car nulle part je ne serai plus mal lu que dans ma patrie. Mais enfin qui sait si je désire être lu aujourd’hui ? — Créer des choses sur quoi le temps essaie en vain ses dents, tendre par la forme et par la substance à une petite immortalité — je n’ai jamais été assez modeste pour exiger moins de moi. L’aphorisme, la sentence, où le premier je suis passé maître parmi les Allemands, sont les formes de « l’éternité » ; mon orgueil est de dire en dix phrases ce que tout autre dit en un volume, — ce qu’un autre ne dit pas en un volume…
J’ai donné à l’humanité le livre le plus profond qu’elle possède, mon Zarathoustra : je lui donnerai sous peu son livre le plus indépendant. —
- ↑ Gœthe, Épigrammes vénitiennes, 66. — N. d. T.