maître tout ce mépris et cette amertume contre les
pharisiens et les théologiens, — et par là on fit de
lui un pharisien et un théologien ! D’autre part, la
vénération sauvage de ces âmes dévoyées ne
supporta plus le droit de chacun à être enfant de Dieu,
ce droit que Jésus avait enseigné : leur vengeance
consistait à élever Jésus d’une façon détournée, à le
détacher d’eux-mêmes, tout comme autrefois les
Juifs, par haine de leurs ennemis, s’étaient séparés
de leur Dieu pour l’élever dans les hauteurs. Le
Dieu unique, le Fils unique : tous les deux étaient
des productions du ressentiment !…
— Et, dès lors, est apparu un problème absurde. « Comment Dieu pouvait-il permettre cela ? » La raison troublée de la petite communauté y trouva une réponse d’une absurdité vraiment terrible : Dieu donna son fils pour le pardon des péchés, en sacrifice. Ah, comme tout à coup c’en fut fini de l’Évangile ! Le sacrifice expiatoire, et cela sous sa forme la plus répugnante, la plus barbare, le sacrifice de l’innocent pour les fautes des pécheurs ! Quel paganisme épouvantable ! — Jésus n’avait-il pas supprimé lui-même l’idée de « péché » ? — N’avait-il pas nié l’abîme entre Dieu et l’homme, vécu cette unité entre Dieu et l’homme, qui était son « joyeux message » ?… Et ce n’était pas pour lui un privilège ! — Dès lors s’introduit peu à peu dans le type du Sauveur : la doctrine du jugement et du retour, la doctrine de la mort par sacrifice, la doctrine de l’ascen-