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NIETZSCHE CONTRE WAGNER

pondéré qui sont loin de compter sans façon cet équilibre instable entre l’ange et la bête au nombre des principes contradictoires de l’existence, — les plus fins, les plus clairs, comme Hafis, comme Gœthe y ont même vu un attrait de plus… Ce sont précisément de telles oppositions qui font aimer la vie… D’autre part, il va sans dire que, lorsque les infortunés animaux de Circé sont amenés à adorer la chasteté, ils n’en voient et n’en adorent que l’opposé, — oh ! avec quel tragique grognement et quelle ardeur ! on peut se le figurer — ils adorent ce contraste douloureux et absolument superflu que Richard Wagner, à la fin de sa vie, a voulu incontestablement mettre en musique et porter sur la scène. Dans quel but ? demandera-t-on, comme de juste.

3.

Il ne faudrait pas cependant vouloir éviter cette autre question : que lui importait vraiment cette virile (hélas ! si peu virile) « simplicité des champs », ce pauvre diable, cet enfant de la nature, qui s’appelait Parsifal, qu’il finit par faire catholique par des moyens si insidieux. — Comment ? ce Parsifal Wagner le prenait-il vraiment au sérieux ? Car qu’on en ait ri, je suis le dernier à le contester, et, comme moi, Gottfried Keller… On aurait souhaité, à vrai dire, que le Parsifal de Wagner eût été conçu gaiement, en quelque sorte comme épilogue et comme drame satyrique, par lequel Wagner le tragique, aurait voulu, d’une façon convenable et digne de lui, prendre congé de nous, de