Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/523

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merveille à visiter car si le temps fait des ravages, il fait aussi des réparations et si d’un côté la pluie efface bien des fresques, d’autres se découvrent sous le badigeon qui tombe. C’est ainsi qu’à Santa Croce on a trouvé dernièrement toute une chapelle de Giotto. J’ai pu m’introduire en fraude, grimper sur les échafauds, et m’assurer que le peintre restaurateur avait vraiment peu de choses faire pour rendre la vie à l’œuvre du vieux Maître. C’est une histoire de saint François en six tableaux, dont quatre ont déjà revu la lumière. Le plus beau peut être, le plus animé est celui où le Saint vient de se dépouiller de ses habits devant son père Pierre Bernardone. Le père irrité lève la main pour frapper, ses amis le retiennent : cependant le sublime mendiant s’est rejeté dans les bras de l’évêque d’Assise qui le couvre d’un pan de sa chape. On ne peut rien imaginer de plus pathétique et en même temps de plus calme que cette scène, ni mieux opposer aux cupidités triviales du monde la pauvreté évangélique dans toute sa puissance et sa grandeur. Je ne sais si je me trompe mais plus je vais en Italie, plus Giotto grandit pour moi : maintenant je le trouve de la taille de Dante ; cependant ne craignez pas que je pousse le fanatisme jusqu’à lui sacrifier Raphaël.

Je ne me sens point encore la force d’écrire la Vie de Savonarola, mais j’ai lu de ce fougueux adversaire de la renaissance des paroles que je vou--