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l’antinomie sociologique

dans bien des cas, en dehors de toute influence de groupe, en dehors de toute suggestion sociale et de tout impératif social. Il ment par intérêt égoïste ; il se ment à lui-même ; il ment au voisin ; il ment au groupe ; il biaise, il ruse avec l’autorité. Sa soumission est souvent apparente et cache des sentiments de révolte ou de secret mépris. Mais à côté des mensonges qui sont inspirés à l’individu par son égoïsme personnel, il y a des mensonges qui, lui sont imposés ou suggérés par le groupe. Ce sont ces mensonges que nous appelons proprement mensonges de groupe.

Le mensonge de groupe se distingue du mensonge individuel par les caractères suivants : 1o par sa généralité ; il est commun à tous les membres du groupe ; sensiblement le même pour tous, alors que le mensonge individuel varie avec les intérêts différents des individus ; — 2o par son caractère de contrainte. Le mensonge individuel est celui dont l’individu prend l’initiative et qui est destiné à servir son égoïsme personnel. Le mensonge de groupe est imposé à l’individu par le groupe. Le fait de ne pas mentir avec le groupe entraîne pour l’individu des sanctions ; — 3o troisième différence qui résulte de la précédente : différence d’évaluation morale. Le mensonge égoïste est jugé répréhensible ; le mensonge de groupe est moral et méritoire. Ne pas mentir, ici, serait précisément l’immoralité. « Être