Page:Pastoret - Ordonnances des rois de France de la troisième race, tome 19.djvu/65

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lxi) PRÉFACE.

toient le désir naturel d’embrasser cette profession sacrée, et les pères s’empressoient de les assurer à leurs fils. Ces avantages toutefois n’existoient qu’au préjudice du peuple, car les nobles même essayoient de les partager, et rejetoient sur lui une grande partie de l’impôt.

Depuis l’établissement du christianisme, on avoit vu le prince qui l’embrassa, prononcer en faveur des prêtres (a) des exemptions qui ne subsistèrent pas toujours : une loi postérieure de cet empereur même, força du moins, et par ce motif sans doute, ceux qui vouloient se consacrer à la profession ecclésiastique. Sous nos Rois, des immunités furent d’abord et facilement obtenues par des églises et des monastères. Un édit de Clotaire I.er, au milieu du Vl.e siècle, étoit loin cependant d’avoir ce caractère ; il enjoignoit à toutes les églises de payer au fisc un tiers de leurs revenus ; presque tous les évêques s’y soumirent ; un seul osa résister ; il alla même jusqu’à menacer le Roi de perdre bientôt sa couronne, s’il vouloit ravir ainsi les biens de Dieu : « Les greniers du prince, ajoutoit-il, doivent nourrir les pauvres ; il seroit inique que le prince les » vidât pour en remplir les siens (b).» Clotaire révoqua ledit, en se reprochant de l’avoir rendu, et témoignant lui-même par cet acte ses regrets et son repentir Ajoutons que ce fut lui, ce même prince qui avoit d’abord voulu exiger le tiers des revenus ecclésiastiques, qui défendit ensuite de lever certains droits, certaines dîmes, sur les églises : Decimator nullus in rebus ecclesiœ accedat, dit un capitulaire de l’an 560 (d). Un capitulaire de Charlemagne (e), postérieur de deux cent quarante années, explique très-bien, dit Montesquieu (f), ce que c’étoit que cette sorte de dîme dont Clotaire exempta l’église : c’étoit le dixième des cochons que l’on mettoit dans les forêts du Roi, pour engraisser.

Selon Grégoire de Tours (g), Chilpéric I.er, qui régna peu de temps àj>rès Clotaire (h), se plaignoit encore néanmoins de la prépondérance prise par le clergé : «Notre fisc, lui fait-il dire, a été appauvri pour omnium rerum habent immunitatem. De bello Gallico, VI, § 13.11 dit même qu’eux seuls nommoient, chaque année, les magistrats, § 7. Voir aussi Dion Chrysostome, discours xlix ; Ammien Marcellin, liv. XV ; Diodore, VI, § 9.

(a) Code théodosien , XVI, loi 2.

On peut voir aussi le titre vi du même Code.

(b) Cet édit est de 5 5 5 ; le second est de 560.

(c) Grégoire de Tours, IV, § 2. Ai¬

moin , II, ch. xxvii. Page 60 du troisième tome des Historiens de France. Goldast, Constitut. imper, tome I.er, p. 1 o. De Foy, Table chronologique, p. 2 5 ; mais voir aussi, p. 37, la remise faite aux églises par le Roi d’un tribut accoutumé, et la confirmation des dons faits par ses prédécesseurs et par lui-même.

(d) Art. 11, titre i.er des Capitulaires, p. 8. Il nomme decimas porcorum.

(e) Article 36, p. 338 des Capitu¬

laires , tome I.cr

(f) Esprit des lois, liv. XXXI, ch.xn, aux notes.

(g) Livre VI, % 46.

(h) Il régna de 570 à 584.