Page:Pline l'ancien - Histoire naturelle, Littré, T2 - 1850.djvu/476

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haut ou en bas. Il marqua53 les articulations des membres ; il exprima les veines, et en outre indiqua les plis et les sinuosités dans le vêtement. Panænus, frère de Phidias, représenta même la bataille livrée à Marathon entre les Athéniens et les Perses. L’emploi des couleurs était déjà si commun et l’art si parfait, que Panænus avait, dit-on, fait ressemblants les chefs qui commandaient dans cette bataille : du côté des Athéniens, Miltiade, Callimaque, Cynægire54 ; du côté des barbares, Datis, Artapherne.

XXXV

(IX.)
1
Bien plus, on ouvrit, du temps que Panænus fleurissait, des concours de peinture à Corinthe et à Delphes ; ce furent les premiers, et Panænus disputa le prix avec Timagoras de Chalcis, qui l’emporta sur lui aux jeux Pythiques : on le voit par d’anciens vers de Timagoras lui-même, l’erreur des chroniques n’est pas douteuse. Après ceux-ci, et toujours avant la quatre-vingt-dixième olympiade, d’autres furent célèbres, comme Polygnote de Thasos, qui le premier peignit les femmes avec des vêtements brillants, leur mit sur la tête des mitres de différentes couleurs : il contribua beaucoup aux progrès de la peinture, car le premier il ouvrit la bouche des figures, il fit voir les dents, et introduisit l’expression dans les visages, à la place de l’ancienne roideur. 2 Il y a de lui, dans le portique de Pompée, un tableau placé jadis devant la curie de Pompée. Ce tableau représente un homme avec un bouclier ; on ne sait si cet homme monte ou descend. Il a peint le temple de Delphes ; à Athènes, le portique appelé Pœcile ; et il a travaillé gratuitement à ce dernier ouvrage avec Micon (XXXIII, 56 ), qui, lui, se faisait payer. Aussi Polygnote eut-il plus de considération ; et les amphictyons (VII, 87), qui forment le conseil général de la Grèce, décrétèrent qu’il aurait des logements gratuits. Il y eut un autre Micon, surnommé le Jeune, dont la fille Timarète exerça aussi la peinture.

XXXVI

1 Dans la quatre-vingt-dixième olympiade vécurent Aglaophon, Céphisodorus, Hérillus55, Événor, père et maître d’un très grand peintre dont nous parlerons en son temps, de Parrhasius. Tous ces artistes sont déjà recommandables, non pas assez toutefois pour que nous devions nous y arrêter dans notre marche vers ceux qui furent les lumières de l’art. Parmi ces lumières brilla tout d’abord Apollodore d’Athènes, dans la quatre-vingt-treizième56 olympiade. Le premier il sut rendre la physionomie ; le premier, à juste titre, il contribua à la gloire du pinceau. Il y a de lui un prêtre en adoration, et un Ajax foudroyé ; cet ouvrage est aujourd’hui à Pergame. Il n’y a pas avant lui un tableau qui puisse attacher les regards.

2 Les portes de l’art étaient ouvertes par Apollodore ; Zeuxis d’Héraclée les franchit l’an quatre de la quatre-vingt-quinzième olympiade, et le pinceau, car c’est encore du pinceau que nous parlons57, le pinceau, qui commençait déjà à s’enhardir arriva entre ses mains à beaucoup de gloire. Quelques auteurs l’ont placé mal à propos dans la quatre-vingt-neuvième58 olympiade, date qu’il faut réserver pour Démophile d’Himère, et Nésée59 de Thasos ; car il fut l’élève de l’un des deux, on ne sait pas lequel. Apollodore, ci-dessus nommé, fit sur ce peintre un vers60 où il disait que Zeuxis gardait pour lui l’art qu’il avait ravi aux autres.

3 Zeuxis acquit tant de richesses, que, dans la pa-