Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/397

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l’Attique les Péloponnésiens. Cette armée opéra sa retraite, et les soldats se dispersèrent, chacun dans sa ville ; mais les Lacédémoniens, indignés, condamnèrent leur roi à une amende si forte, qu’il ne put la payer et qu’il s’expatria. Cléandridas avait pris la fuite : ils le condamnèrent à mort. Cet homme était le père de Gylippe, celui qui vainquit les Athéniens en Sicile. Il paraît que la nature avait mis, dans le cœur de Gylippe, l’amour de l’argent, comme une maladie héréditaire. Car il en fut le honteux esclave ; et, convaincu d’actes infâmes, il fut banni de Sparte, ainsi que nous l’avons raconté dans la Vie de Lysandre[1].

Dans le compte des frais de cette expédition, Périclès porta une somme de dix talents[2], en disant seulement qu’elle avait été employée en dépenses nécessaires ; et le peuple approuva ce compte, sans s’occuper de cette somme, et sans lui demander ce qu’il tenait secret. Plusieurs écrivains, entre autres le philosophe Théophraste, rapportent qu’il envoyait à Sparte dix talents chaque année. Il les distribuait en largesses à tous les magistrats en charge, afin de détourner la guerre ; achetant, non la paix, mais le temps pendant lequel il pourrait se préparer à loisir, pour faire ensuite la guerre avec tous ses avantages. Par conséquent, il se tourna aussitôt contre les rebelles ; et, passant en Eubée avec cinquante vaisseaux et cinq mille hommes d’infanterie, il fit rentrer toutes les villes dans le devoir. À Chalcis, il chassa les habitants les plus riches et les plus en crédit, qu’on appelait les Hippobotes[3] ; à Hestiée, il enleva toute la population, et il la remplaça par une colonie d’Athéniens : il se montra inexorable, cette fois, envers les Hes-

  1. Cette Vie est la vingt-troisième de la collection, bien que Plutarque, dans son dixième volume, s’y réfère comme à un ouvrage déjà existant.
  2. Cinquante et quelques mille francs de notre monnaie, mais valant plus de dix fois cette somme.
  3. Mot à mot, nourrisseurs de chevaux.