Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/308

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s’adresse au travail autant qu’à la consommation, à la propriété foncière plus qu’à la mobilière, à l’agriculture plus qu’à l’industrie ? Qu’importe à la science cette interminable constatation de faits bruts, si jamais, par votre analyse, une seule idée n’en ressort ?

Tous les prélèvements que l’impôt, la rente, l’intérêt des capitaux, etc., opèrent sur la consommation, entrent dans le compte des frais généraux et font partie du prix de vente ; de sorte que c’est toujours, à peu de chose près, le consommateur qui paye l’impôt : nous savons cela. Et comme les denrées qui se consomment davantage sont aussi celles qui rendent le plus, il arrive nécessairement que ce sont les plus pauvres qui sont les plus chargés : cette conséquence, comme la première, est inévitable. Que nous importent donc, encore une fois, vos distinctions fiscales ? Quel que soit le classement de la matière imposable, comme il est impossible de taxer le capital au delà du revenu, le capitaliste sera toujours favorisé, pendant que le prolétaire souffrira iniquité, oppression. Ce n’est pas la répartition de l’impôt qui est mauvaise, c’est la répartition des biens. M. Chevalier ne peut l’ignorer : pourquoi donc M. Chevalier, dont la parole aurait plus d’autorité que celle d’un écrivain suspect de n’aimer pas l’ordre de choses, ne le dit-il pas ?

De 1806 à 1811 (cette observation, ainsi que les suivantes, est de M. Chevalier) la consommation annuelle du vin à Paris était de 160 litres par personne : aujourd’hui elle n’est plus que de 95. Supprimez l’impôt qui est de 30 à 35 c. par litre chez le détaillant ; et la consommation du vin remontera bientôt de 95 litres à 200 ; et l’industrie vinicole, qui ne sait que faire de ses produits, aura un débouché. — Grâce aux droits mis à l’importation des bestiaux, la viande a diminué pour le peuple dans une proportion analogue à celle du vin ; et les économistes ont reconnu avec effroi que l’ouvrier français rendait moins de travail que l’ouvrier anglais, parce qu’il était moins nourri.

Par sympathie pour les classes travailleuses, M. Chevalier voudrait que nos manufacturiers sentissent un peu l’aiguillon de la concurrence étrangère. Une réduction du droit sur les laines de 1 fr. par pantalon laisserait dans la poche des con-