Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/310

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fois neuf et vrai, que c’est précisément ce qu’il y a de mieux dans nos lois d’impôt. Mais M. Chevalier, qui conserve toujours, quoi qu’il fasse, un vieux ferment de radicalisme, a préféré déclamer contre le luxe, chose qui ne pouvait le compromettre vis-à-vis d’aucun parti. « Si dans Paris, s’est-il écrié, on demandait aux voitures particulières, aux chevaux de selle ou de voiture, aux domestiques et aux chiens, l’impôt qu’on perçoit sur la viande, on ferait une opération de toute équité. »

Est-ce donc pour commenter la politique de Mazaniello que M. Chevalier siège au Collège de France ? J’ai vu à Bâle les chiens portant au cou la plaque fiscale, signe de leur capitation, et j’ai cru, dans un pays où l’impôt est presque nul, que la taxe des chiens était bien plus une leçon de morale et une précaution d’hygiène, qu’un élément de recettes. En 1844, l’impôt sur les chiens a rapporté pour toute la province du Brabant (667,000 habitants), à 2 fr. 11 c. 1/2 par tête, 63,000 fr. D’après cela, on peut conjecturer que le même impôt, produisant pour toute la France 3 millions, amènerait un dégrèvement sur l’impôt de quotité de huit centimes par personne et par an. Certes, je suis loin de prétendre que 3 millions soient à dédaigner, surtout avec un ministère prodigue ; et je regrette que la Chambre ait repoussé la taxe des chiens, qui aurait toujours servi à doter une demi-douzaine d’altesses. Mais je rappelle qu’un impôt de cette nature a bien moins pour principe un intérêt de fiscalité qu’un motif d’ordre ; qu’en conséquence il convient de le regarder, au point de vue fiscal, comme de nulle importance, et qu’il devra même être aboli comme vexatoire, lorsque le gros du peuple, un peu plus humanisé, se dégoûtera de la compagnie des bêtes. Huit centimes par an, quel soulagement à la misère !…

Mais M. Chevalier s’est ménagé d’autres ressources : les chevaux, les voitures, les domestiques, les objets de luxe, le luxe enfin ! Que de choses dans ce seul mot, le luxe !

Coupons courtà cette fantasmagorie par un simple calcul : les réflexions viendront après. Fn 1842, le total des droits perçus à l'importation s’est élevé à 129 millions. Sur cette somme de 129 millions, 61 articles, ceux de consommation