Page:Répertoire national ou Recueil de littérature canadienne, compilé par J Huston, vol 1, 1848.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
14
LE RÉPERTOIRE NATIONAL

colas. Justement, mais c’est que j’suis si honteux que ça m’coute à l’y en parler ; j’ons été ben souvent au château dans c’t’intention, mais drès que j’suis à la porte le cœur me bat, j’n’ose entrer, et j’m’en reviens sans avoir rien dit.

le bailli. Le pauvre Colas ! mais crois-tu que Colinette ait aussi de l’amitié pour toi ?

colas. Oui, je l’crois.

le bailli. Comment t’en es-tu aperçu ?

colas. Oh ! dame, à ben des choses.

le bailli. T’a-t-elle dit quelquefois qu’elle t’aimait ?

colas. Si elle me l’a dit ? Oh ! oui, pus d’cent fois.

le bailli. Et jamais tu ne t’es brouillé avec elle ?

colas. Oh ! pour ça, si fait ; mais tant y a toujours, que si j’nous brouillons par ensemble je n’tardons pas à nous raccommoder ; enfin tenez, M. le Bailli,


AIR :

Colinette est un vrai trésor,
Tout plait en c’te jeune bergère,
Joli minois, taille légère,
On n’peut s’tenir d’l’aimer d’abord,
    C’est comme un sort.
Pour moi que l’amour engage,
À songer au mariage,
Je sens bien, sauf vot respect,[1]
Que Colinette est tout mon fait, (bis.)

Quand aux bois elle va sautant,
Je la guettons pour aller avec elle,
Elle r’fuse d’abord, d’abord ell’me querelle,
Mais j’l’en prions si poliment,
    Qu’elle y consent.
Pour moi que l’amour engage,
À songer au mariage,
Je sens bien, sauf vot respect,
Que Colinette est tout mon fait, (bis,)

  1. Chaque fois que Colas dit ces mots « sauf vot respect, » il ôte son chapeau
    et salue profondément le Bailli.