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gris bleu de ciel, damiers aux ailes tachetées, malamocs aux pieds d’azur semé de vermillon ; albatros au duvet blanc de neige, au vol doux et harmonieux ; tous, oiseaux de mers, compagnons de notre solitude.

Nous admirions surtout les teintes ravissantes et les formes fantastiques des nuages, les levers et les couchers de soleil, tableaux pleins de splendeur et les plus majestueux de la nature.

La nuit, souvent privés de sommeil, nous écoutions la cadence des flots et le vaste silence des espaces sans fin ; nous contemplions le scintillement des constellations nouvelles pour nous, et l’onde étincelante, flots d’azur ruisselants d’or et de pierreries, semblables à des vêtements de reine épars, à des débris de cieux étoiles. Nous interrogions les brises légères : peut-être avaient-elles passé sur des terres chéries, peut-être nous apportaient-elles des accents connus, des révélations désirées. Il faut être bien loin de tout ce qui nous est cher pour connaître la puissance des douces et mystérieuses illusions.

Cependant, depuis plusieurs jours, notre horizon s’était bordé de nuages presque immobiles ; un calme sinistre nous accablait ; le baromètre baissait continuellement ; le capitaine était inquiet et passait la nuit sur le pont.

Les voyageurs ne se doutaient guère de ce qui les menaçait ; cependant, comme j’avais subi déjà un grand nombre de cyclones, que j’avais étudié leurs lois et leurs signes précurseurs, je comprenais les inquiétudes que le capitaine me confiait. Tous les navires du nord que nous rencontrions avaient rentré leurs voiles, ils appréhendaient ce qui devait arriver.