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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS

— Tu dis ? demanda Figeroux en levant sa lourde canne, répète un peu, pour voir !

— Jamais ! reprit-elle d’une voix résolue, jamais il ne me touchera.

Le mulâtre abaissa le bras, mais elle avait glissé de côté, évitant ainsi le coup de bâton, et s’était mise à courir. Figeroux la poursuivit quelques instants, jusqu’à ce qu’il fût hors de souffle. Alors il s’arrêta, tout haletant, et d’une main furieuse lui jeta son bâton dans les jambes.

— Carne ! cria-t-il, je te retrouverai.

Dans sa fuite Zinga se retourna, et ramassant à pleines mains de la bouse de vache qui séchait sur un mur, elle la lui lança au visage en éclatant de rire. Figeroux s’essuya sa face souillée, grommela je ne sais quelle injure et reprit sa marche lentement derrière la négresse. Il était patient dans la vengeance.

— Vous êtes maintenant édifiée, me dit le docteur.

— Ils sont révoltants d’impudeur et de scélératesse ! m’écriai-je.

— Et qu’allez-vous faire ?

Il souriait en me regardant avec curiosité comme s’il avait deviné ma réponse et déjà s’en égayait. Je lui répondis d’un ton ferme :

— Renvoyer le mulâtre et enfermer Zinga, dès que je serai de retour.

Je le quittai sur ces mots. J’étais outrée de colère, et, en ce moment, bien décidée à traiter le couple Figeroux comme je l’avais dit. Mais la prudence domina mon ressentiment, ou plutôt une image qui me