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SUR LES DIEUX DE LA GRÈCE,

encore distinctement sur le vaste océan, sous la forme d’un poisson brillant comme l’or, s’étendant à un million de lieues, avec une corne énorme, à laquelle le roi, comme Héri le lui avoit commandé, attacha le vaisseau avec un câble fait d’un grand serpent, et, heureux de sa conservation, il se tint debout, louant le destructeur de Madhou. Quand le monarque eut achevé son hymne, le premier mâle, Bhagavat, qui veilloit à sa sûreté sur la grande étendue des eaux, parla tout haut à sa propre divine essence, prononçant un Pourâna sacré, qui contenoit les règles de la philosophie Sànk’hya : mais c’étoit un mystère infini qui devoit être caché dans le sein de Satyavrata ; assis dans le vaisseau avec les saints, il entendit le principe de l’ame, l’être éternel, proclamé par le pouvoir suprême. Ensuite Héri, se levant avec Brâhmah du sein du déluge destructeur, qui étoit apaisé, tua le démon Hayagrîva, et recouvra les livres sacrés. Satyavrata, instruit dans toutes les connoissances divines et humaines, fut choisi dans le calpa actuel, par la faveur de Vichnou, pour septième Menou, et surnommé Vaivasaouata : mais l’apparition d’un poisson cornu au religieux monarque, fut Maya [ou illusion] ; et celui qui entendra dévotement ce récit historique et allégorique, sera affranchi de l’esclavage du péché(34). »

Cet abrégé de la première histoire indienne qui subsiste aujourd’hui, me paroît très-curieux et très-important : car l’histoire, quoique bizarrement rédigée en forme d’allégorie, semble prouver qu’il existe dans l’Inde une tradition primitive du déluge universel décrit par Moïse, et fixe par conséquent l’époque où commence réellement la chronologie authentique des Hindous. Nous trouvons, il est vrai, dans le Pourân, d’où ce récit est tiré, un autre déluge, qui eut lieu vers la fin du troisième âge, lorsque Youdhichtir(35) gémissoit des persécutions de Douryôdhan, son ennemi invétéré, et lorsque Crichna, qui s’étoit incarné depuis peu, afin de secourir les hommes religieux et de détruire les pervers, faisoit des prodiges dans le pays de Mat’hourâ(36) : mais ce second déluge fut purement local, et sans