Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/129

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ans ; l’idée m’en est restée comme s’il eût été fait de fil d’argent ; je crois le voir encore. La passion des nids me faisait quelquefois parcourir de vastes campagnes, et faire l’école buissonnière. On ne peut comparer cette passion qu’à celle de la chasse.

J’ai dit que les filles continuaient à me poursuivre. L’aînée de celles de ma nourrice, voisine de Mme  Rameau, avait entrevu quelque chose de la scène de l’écurie-aux-mules : elle leur fit un jour des reproches, en leur représentant que je n’étais plus un enfant et que leur conduite à mon égard pouvait donner d’elles une mauvaise idée. — « Vous êtes bien bon ! » me dit-elle ; « quand elles viendront pour vous embrasser, r’broussez-vous, comme avec Nannette ; … mais pas si fort ! et vous ne l’aurez pas fait deux fois, qu’ell’vous laisseront de repos »… Les filles regardèrent la remontrance comme suggérée par ma nourrice. Une d’entre elles, la jolie Marguerite Bourdillat, qui n’avait que mon âge, m’ayant trouvé seul le soir, osa bien me dire, qu’elle « allait me mettre une fille à la joue ! » Elle s’approche : je ne fuis pas ; elle me prend : je la serre ; elle m’embrasse : je le rends ; je triple, je quadruple ; enfin l’audacieuse petite assailleuse, d’abord obligée de se défendre, est bientôt réduite à s’enfuir, en disant : « Ha mâs ! j’craijos qu’c’était vous qui aligne vou’ ensauver ! » Je lui répondis, que « depuis quelque temps… je ne m’ensauvais » plus, et que j’embrassais trois fois toutes les filles. » — Ho ben, all’y seront toute ettrappées ; car je