Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/221

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plus d’intérêt, que peut-être c’était l’épouse que mon père me destinait. Je n’en fus pas fâché ; Julie était trop demoiselle, et je ne me sentais pas le genre de mérite nécessaire pour l’obtenir. J’achevai de l’oublier. Je cessai de même, depuis ce voyage à Nitry, de m’occuper des beautés Saxiates. Ce fut Anne Simon, et depuis Mlle  Fanchette, qui me donnèrent l’idée d’une destination au mariage, telle que je la propose dans le Nouvel Abeilard, imprimé en 1778.

Cette heureuse journée passa comme un instant. Lorsque je me ressouviens des beaux jours de ma jeunesse, jusques à ma sortie d’Auxerre, en 1755, je trouve que l’âge mûr ne m’a rien donné de tel ; que j’ai toujours perdu, à mesure que je suis avancé en âge, et que c’était la raison des belles allégories de la Genèse : la naissance d’un homme y est celle du genre humain ; sa première faiblesse pour une femme, celle du Père de l’Espèce humaine pour notre Mère commune ; l’expérience que nous acquérons avec l’âge et par l’instruction, le fruit de l’arbre de la Science du bien et du mal, etc… Infortunés humains ! vous êtes heureux, quand vous ne savez pas le sentir, et malheureux, quand toutes vos facultés ont leur développement !

Nous partîmes au coucher du soleil, après un souper chez le père Simon, où se trouvait toute la famille, chacun ayant apporté le sien. Nous fûmes reconduits par tout ce monde ; pères, mères, filles, garçons. Mon père prit le chemin de la Farge,