Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/259

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ment, nous nous trouvâmes à la porte de l’église, et je courus au bénitier, pour présenter l’eau-bénite.

Au retour, ce fut avec mon père que s’en revint son honorable parent. Je marchais derrière eux, sans dessein ; mais j’entendis quelque chose de leur conversation : je vais rapporter fidèlement le peu que j’en ai retenu.

— « Hé bien ! mon respectable parent ? » dit mon père. — « Je vais vous dire ce que je pense… » J. Restif se retourna en ce moment, et, m’ayant aperçu, il parla bas. — « Mais enfin, » dit mon père au bout de quelques minutes, « quelle est votre opinion ? en ferai-je un laboureur ? — Non. » Ce fut le mot fatal qui décida mon sort ; il retentit encore à mon cœur, ce non, que la bonté dicta, et qui m’a fait tant de mal ! Après ce mot, J. Restif continua : « Cet enfant a beaucoup de son aîné ; mais ce n’est pas plus le même caractère, que c’est la même mère : ces deux enfants se ressemblent dans tout ce qu’ils tiennent des Restif ; mais ce qui vient de leurs mères les différencie prodigieusement ! » et il répéta : « Prodigieusement ! L’autre a réussi, tout le monde l’estime, je le sais. Pour celui-ci, je n’oserais lui promettre la même estime… — Comment ? » dit mon père, « avez-vous vu en lui

    Non est ignotæ gratia magiia lyræ :
    Si Venerem Cous nunquam pinxisset Apelles,
    Mersa sub œquoreis illa lateret aquis.

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