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L’ISLAMISME

Ayant satisfait à la prière et au jeûne, les musulmans doivent pratiquer la charité : c’est une obligation stricte. Le Coran détermine la part que chacun doit donner aux pauvres en raison de sa fortune : c’est la dîme, impôt charitable dont le revenu doit aller tout entier aux malheureux, aux voyageurs, aux débiteurs honnêtes, etc…, selon une proportion fixée par Mahomet lui-même mais qui s’est malheureusement transformée de nos jours presque partout en impôt ordinaire pour l’unique profit des administrations qui en assurent le recouvrement. Outre ces dons obligatoires, les musulmans pratiquent très largement l’aumône volontaire que leur recommande le Prophète. L’hospitalité arabe est proverbiale ; les fondations pieuses, refuges, caravansérails, monuments publics sont en quantités innombrables. Tous les hommes sont égaux et les riches sont considérés par le Coran comme les débiteurs de leurs frères.

Il faut encore accomplir au moins une fois pendant sa vie — sauf en cas d’impossibilité matérielle — le pèlerinage de La Mecque. Grâce à cette prescription, La Mecque est restée pour les Musulmans « le centre du monde », la capitale sainte, le trait d’union entre fidèles de tous pays. Elle est relativement peu observée en raison des difficultés et du coût du voyage et ceux qui ont accompli le pèlerinage — on les nomme hadjis — sont entourés d’une considération particulière. L’origine du pèlerinage à La Mecque est bien antérieure à l’islam : les docteurs affirment qu’il exista de tout temps et qu’Abraham, Moïse, Jésus, l’ont tour à tour accompli. La façon dont on l’exécute représente une action tout à fait méritoire.

Grâce aux pèlerinages annuels, le monde musulman forme un tout relativement solidaire ; leur rôle politique l’emporte encore sur leurs effets religieux. Ils font de l’Islam une patrie commune à tous les croyants, une sorte d’internationalisme. Ils sont sa force et la raison majeure de sa vitalité. À présent qu’on construit un chemin de fer vers La Mecque, les hadjis deviendront plus nombreux mais il n’empêche, comme le rapporte l’un des très rares Européens qui aient visité la ville sainte, Gervais-Courtellemont, il n’empêche « que les esprits éclairés du monde musulman s’y opposent de toute leur énergie : toute la morale philosophique du pèlerinage en serait annihilée. Plus de commune humilité sous le vêtement rudimentaire du pèlerin, plus de communes fatigues à endurer par le riche et par le pauvre, confondus, pour un ins-