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ayant subi une simple pression morale passagère, c’est-à-dire comme n’étant pas aliéné dans le sens social et légal du mot.

Après cette lecture, Baillarger et Lunier demandèrent qu’on voulût bien établir une distinction entre les cas de contagion délirante où le second malade présente, dans l’intelligence et les actes. les mêmes troubles que le premier, et les cas infiniment plus nombreux où des gens faibles d’esprit et vivant avec un aliéné finissent par partager ses convictions délirantes et croire à la réalité de ses hallucinations ou de ses conceptions maladives, sans toutefois devenir aliénés eux-mêmes. Un mois plus tard, devant la même société, Baillarger insistait encore sur la différence qui sépare les simples cas de crédulité des cas de contagion délirante. « Beaucoup d’aliénés, disait-il, influencent leur entourage et parviennent quelquefois à faire partager à leurs parents les idées fausses qu’engendre leur délire, mais ce n’est pas là de la folie ; ce sont des faits de crédulité. » Et, de fait, si on parcourt le mémoire de Lasègue et Falret, on y pourra distinguer sans peine des simples cas de crédulité des cas un peu plus complexes où le second malade, non content d’accepterle délire du premier, y participe véritablement. Mais il ne suffisait pas de cette distinction première pour caractériser exactement et classer les faits observés par Lasègue et Falret. Quatre ans plus tard, dans sa thèse, La Folie à *Deux (Paris, 1880), Régis distingue parmi les sujets influencés ceux qui sont des délirants ou plutôt des codélirants il refuse cependant aux uns et aux autres le titre d’aliénés et il conteste que les plus influencés puissent jamais arriver par cette voie à l’aliénation mentale proprement dite. Pour l’éminent clinicien de Bordeaux, l’aliénation mentale caractérisée, la psychose hallucinatoire systématique dans l’espèce, ne se communique pas. Il refuse de voir autre chose qu’un fait psychologique curieux 1 dans les cas de crédulité ou de délire par influence rapportés jusqu’à lui et, sous le nom de folie à deux, il étudie uniquement les psychoses hallucinatoires systématiques survenant simultanément chez deux prédisposés, en vertu du contact intime et perpétuel dans lequel ils vivent et des influences qui s’exercent en même temps sur l’un et sur l’autre.

Marandon de Montyel accepta sans réserves~ le groupe que Régis 1. In Op. Laud., p. 48.

..4 !:m. méd. Psych., 1881, p. 28. Contribution l’étude de la folie à deux.