Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/110

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si des améliorations de cette espèce influent sur la rente, il faudra examiner si la différence entre le produit obtenu par l’emploi de différentes portions de capital, augmente, diminue, ou reste la même. Si l’on consacre quatre portions de capital à la terre, 50, 60, 70, 80, chacune donnant les mêmes résultats, et que, par quelque amélioration favorable à la formation de ce capital, on en puisse retirer 5 de chaque portion, en sorte qu’elles restent à 45, 55, 65 et 75, la rente des terres à blé ne subira aucune altération ; mais si les améliorations sont de nature à permettre de faire sur la plus forte portion de capital, l’économie de la totalité de la portion employée d’une manière moins productive, la rente baissera à l’instant, car la différence entre le capital le plus productif et celui qui l’est le moins, se trouvera diminuée, et c’est cette différence qui constitue la rente.

Je ne multiplierai pas les exemples, et j’espère en avoir dit assez pour prouver que tout ce qui diminue l’inégalité entre les produits obtenus au moyen de portions successives de capital employées sur le même ou sur de nouveaux fonds de terre, tend à faire baisser la rente, tandis que tout ce qui augmente cette inégalité produit l’effet opposé, et tend à la faire hausser[1].

En parlant de la rente du propriétaire, nous l’avons considérée dans ses rapports avec le produit total, sans avoir le moindre égard à sa valeur échangeable ; mais puisque la même cause — qui est la difficulté de produire, — fait hausser la valeur échangeable des produits

  1. C’est après avoir fait, dans son cours d’Économie politique, une magnifique et séduisante exposition de la théorie de la rente, que M. Rossi, partageant l’enthousiasme de M. Culloch et de la plupart des économistes anglais, a consacré à Ricardo ces paroles qui sont une véritable couronne scientifique : « Telle est la base de cette théorie si neuve et si capitale, qui est, disons-le, la gloire de l’économie politique moderne et qui donne l’explication des faits économiques les plus importants et les plus compliqués. » — Nous ne savons pas jusqu’à quel point cette théorie est moderne, puisque, déjà bien avant Ricardo et Malthus, elle avait été nettement esquissée par Anderson et E. West : mais nous sommes certain qu’elle ne constitue pas la gloire de l’économie politique actuelle. On n’y retrouve pas ces larges et fortes conséquences, ces arguments puissants qui font changer de face les questions et les sciences. C’est à la faveur d’hypothèses, d’analyses contestables et contestées, que Ricardo déroule la chaîne de ses aphorismes ; et tout cela pour aboutir à prouver que la rente, cette dîme passablement aristocratique, n’ajoute rien aux frais de production, c’est-à-dire, pour aboutir à une logomachie ou à une erreur. Qu’on le sache bien, la gloire de Ricardo, comme celle de l’économie politique, n’est pas là : il faut la chercher, la trouver ailleurs, et c’est ce que nous avons fait. — A. F.