Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 2, 1916.djvu/89

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Acadiens qui demeuraient près de cette frontière à passer du côté des Français, mais sans y réussir[1].

Avant d’aller plus loin, il convient de nous occuper de cet abbé Le Loutre, qui a joué un rôle si considérable dans les événements de cette époque. Cet homme s’est attiré bien des haines, non moins grandes de la part des officiers français et peut-être même des Acadiens, que de la part des Anglais[2].



    salut était de fuir et de se réfugier sous le drapeau français. »(Québec. Pruneau & Kirowac, Libr. Édit. 1897, p. 406).

  1. Il y réussit cependant bientôt : « Cette voix puissante et quasi prophétique (de Le Loutre) ne pouvait manquer d’être écoutée, et Cornwallis fut bientôt effrayé du torrent d’émigration qui se dirigeait vers Beauséjour. » (Casgrain. Ibid.) Cf. Bourgeois, Les Anc. mission…, p. 45. Cf. A. C. 1887, p. 179. M. de la Jonquière au ministre. Sept. 9, 1749. Québec. Ihid., p. 181. M. Bigot, Intendant, au ministre. Québec, Sept. 30, 1749. Abbé Le Loutre writes : « … if an attempt is made to compel them (les Acadiens) to tako the oath, they will take up arms ivith the Indians. » Canada. Corr. gén., 1749, vol. 93, c. 11, fol. 253, 2 ½ p. — Cf. Lettre de Le Loutre à Bigot, datée de Baie Verte, 15 août 1750 : … « Nous avons ici un grand nombre de personnes à supporter, et à l’automne nous aurons un apport de plus de 60 familles de Beauhassin… » (Dans N. S. Doc., p. 193).

    Lorsque l’abbé Le Loutre demanda aux Acadiens de passer sur ce qu’on disait être le territoire français de l’isthme de Chignectou, ceux-ci ne répondirent pas avec beaucoup d’empressement… Mais quand, trois mois plus tard, le gouverneur Cornwallis leur enjoignit de prêter un serment d’allégeance sans réserve, les Acadiens comprirent mieux la sollicitude et l’esprit de prévoyance du missionnaire Le Loutre. L’Histoire du Canada, par Bourgeois. Montréal, Beauchemin, p. 125).

  2. Que Le Loutre se soit attiré la haine des Anglais, on le comprend, et on ne le sait que trop, les pièces officielles anglaises abondant en calomnies et en injures grossières à son égard. Il était plus fin qu’eux, il déjouait leur plans, il savait que leur intention était de protestantiser et de dénationaliser les Acadiens ou même de les expulser. C’est en prévision de ce malheur, que, meilleur apôtre encore que bon patriote, il exhortait ceux-ci à fuir en territoire français. Que ne l’ont-ils tous écouté ! Richard expliquera plus loin, ainsi que d’ailleurs le fait Casgrain (loc. cit.) la raison pour laquelle quelques-uns des officiers français ont chargé la mémoire de ce missionnaire. Il était prêtre trop zélé pour