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AVERTISSEMENT



Ce serait une œuvre curieuse à faire et terrible à entreprendre, qu’un véritable et véridique dictionnaire d’argot. Pour la partie historique, pour l’étymologie et en quelque sorte la philosophie des vocables, il ne faudrait pas moins qu’un Littré, consacrant à cette besogne des trésors de science et de patience. Pour les définitions précises et les sens actuels des mots en usage, il faudrait un observateur consumant sa vie dans les milieux étranges et souvent peu accessibles où l’on parle cette langue infiniment variée et renouvelée incessamment. L’auteur du dictionnaire d’argot devrait donc être à la fois le plus consciencieux des rats de bibliothèque et le plus audacieux des batteurs de pavé. Un pareil homme ne saurait se rencontrer, j’imagine, et, en tous cas, ce n’est certes point votre serviteur qui aura jamais la prétention de se donner pour ce merle blanc.

Tout ce que j’ai voulu faire ici, c’est offrir aux lecteurs de la Chanson des Gueux la traduction fidèle des termes argotiques employés dans ce livre. J’ai même poussé la réserve et le scrupule jusqu’à noter seulement la nuance particulière sous laquelle je prenais chacun de ces termes, cela sans plus, sans me préoccuper des autres acceptions qu’il pouvait avoir. Mais, en revanche, j’affirme hautement que tous les sens présentés par ce glossaire sont rigoureusement exacts, puisés à la bonne source, à la seule bonne, c’est-à-dire recueillis de la bouche même des gens qui s’expriment en argot aussi naturellement que nous nous exprimons en français. Le mérite est plus rare qu’on ne croit, et, si mince qu’il puisse paraître, je n’hésite pas à en tirer quelque orgueil.