Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/239

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aurons des jours aussi agréables qu’occupés, pourvu que nous nous portions bien.

J’ai joué de la guitare avant-hier ; j’ai remarqué que les accords ne paraissaient affecter la petite que comme un bruit auquel elle était très promptement assez accoutumée pour n’y plus faire attention ; mais une succession de sons très doux semblait un peu l’attacher, et, plus que tout cela, le chant modéré de la voix.


Jeudi matin.

Hier au soir, à neuf heures, M. de B[ray] m’a envoyé la Botanographie de Lestiboudois, en me faisant dire qu’il l’aurait apportée lui-même, si le temps eût été un peu moins mauvais ; c’est sans doute par attention, pour me la faire voir comme un ouvrage nouveau sur un objet dont il sait que je m’amuse ; peut-être aussi pour me demander comment je le trouve ; car tu sais qu’il prend langue de tout le monde ; il avait envie que je demandasse l’exemplaire de l’abbé Reynard, il y a quelques jours, pour que je visse ce que c’était. Je n’ai fait encore que jeter un coup d’œil, et, si j’osais juger d’après, je dirais que les Éléments de botanique à l’usage de l’École vétérinaire[1] me paraissent préférables pour un commençant qui n’a aucune idée de la science dont il s’agit de lui inspirer le goût. Lestiboudois a suivi le système du chevalier de La Marck[2], qui me semble défectueux. L’ordre de ses classes n’est pas conforme à la marche naturelle qui va du simple au composé ; il commence par les fleurs flosculeuses, puis les radiées, les ombellifères, etc…

  1. Éléments de botanique à l’usage de l’École royale vétérinaire, qu’avaient publié à Lyon, en 1766 (2 vol. in-8o), Marc-Antoine-Louis Claret de la Tourrette et Rosier, et dont le savant Gilibert donna en 1787 une troisième édition, augmentée et refondue (3 vol. in-8o), en supprimant le sous-titre.
  2. Le grand naturaliste Lamarck (1744-1829) n’était encore connu que comme botaniste. Créateur de la méthode dichotomique, il avait publié en 1778 sa Flore française, qui le fit entrer l’année suivante à l’Académie de Sciences. Il travaillait alors pour l’Encyclopédie méthodique, où il donna son Dictionnaire botanique en 15 volumes in-4o. Ce n’est que plus tard qu’il renouvela la Zoologie.