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Les raves rondes et longues, brassica et rapa, cultivées ici dans le même terrain, se confondent sur nos tables sans obtenir l’une sur l’autre une préférence bien motivée.

Ce n’était pas pour nous qu’il avait été question de la Flore de Bulliard, mais pour les pharmaciens de l’hôpital de la petite ville ; le prix de l’ouvrage a désorienté le zèle, et l’on ne songe plus à cette acquisition. Quant à nous, qui employons notre argent avec des pionniers, des maçons et des charpentiers, nous ne pouvons faire aucun calcul bibliographe.

Je ne sais quel froid il fait à Paris, mais ici nous gelons tout en vie et nous sommes confinés sans savoir comment nous rendre en ville par des chemins glacés, où les chevaux ni les bœufs ne peuvent tenir pied. Mandez-moi donc votre degré de froid ; je ne vous rendrai pas la pareille, car, dans notre immense maison, il n’y a sûrement pas l’ombre d’un thermomètre. Des brouillards tombent chaque jour en pluie qui se gèle à l’instant. Le plus petit brin de paille parait de la grosseur d’une baguette, par la quantité de glace transparente qui l’enveloppe ; nos arbres sont chargés en proportion de leurs ramifications et ils cassent de toutes parts. Nous devons cette température rigoureuse, qui est infiniment plus supportable à Villefranche, au voisinage des montagnes.

Recevez nos amitiés, nos embrassements, etc


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[À BOSC, À PARIS[1].]
Décembre ? 1788 ?, — [de Lyon.]

Pour moi, qui n’entre pas dans la fourrure, je ne parle que de chansons. Vous m’avez envoyé le plus joli petit coquin de Noël qu’on puisse imaginer ; nous l’avons chantonné, goûté, etc… J’ai vu autrefois le

  1. Coll. Alfr. Morrison. — Écrit sur la quatrième page d’une lettre de Roland à Bosc demandant des renseignements sur les fourrures. Nous avons placé cette lettre à la fin de 1788, parce que c’est à ce moment-là que Roland traivaillait à cet article de son Dictionnaire. Mais elle pourrait tout aussi bien être du commencement de 1789. Le texte indique seulement qu’elle est d’une fin ou d’un commencement d’année. On y voit aussi qu’elle est écrite de Lyon, où Madame Roland annonçait qu’elle passerait les deux ou trois premiers mois de 1789 (lettre 311).