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ANTOINETTE

se hâtait de terminer le ménage, et elle laissait la porte de la cuisine ouverte, afin de mieux entendre Olivier ; mais, malgré toutes les précautions qu’elle prenait, il se plaignait impatiemment qu’elle fît du bruit en rangeant la vaisselle. Alors, elle fermait la porte ; et, quand elle avait fini, elle venait s’installer dans une chaise basse, non pas près du piano, — (car il ne pouvait souffrir d’avoir quelqu’un auprès de lui, quand il jouait), — mais près de la cheminée ; et là, comme un petit chat, pelotonnée sur elle-même, le dos tourné au piano, et les yeux attachés aux yeux d’or du foyer, où se consumait en silence une briquette de charbon, elle s’engourdissait dans les images du passé. Quand neuf heures sonnaient, il lui fallait faire un effort pour rappeler à Olivier qu’il était temps de finir. Il était pénible de l’arracher, et de s’arracher soi-même à ces rêveries ; mais Olivier avait encore du travail pour le soir, et il ne